TESO:Présentation d'un personnage/Famia Mercius

De La Grande Bibliotheque de Tamriel
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Date de publication : 20/09/2018



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Extrait des œuvres de Talen-Nakal, conteur des Vive-Gorges

Une jeune éclose me demanda un jour :

— Deelith, quelle est la créature la plus étrange que tu aies vue dans Tourbevase ?

Elle me regardait avec des yeux gros comme les lunes, s’attendant sans doute à un haj-mota entièrement blanc ou un wamasu à deux têtes. J’agitai la queue et répondis.

— Petit-cœur, tu connais déjà cette créature, la plus étrange de tout Tourbevase.

Elle fronça le rostre e sa langue darda, incrédule.

— C’est impossible, deelith. Mes pieds ne m’ont pas portée plus loin que Lilmoth. Je n’ai jamais goûté l’eau de la Basse-Fange, ni nagé dans le Ree-An-Wo. Qu’ai-je pu voir de si inhabituel ?

— Tu n’es jamais entrée dans la maison du passé, à Lilmoth ? Tu n’as jamais rencontré la peau-douce qui y vit ?

Bien sûr, je connaissais la réponse. Tout le monde connaît cet endroit et ses tas d’objets vieux et inutiles.

— Famia, ricana-t-elle comme si l’idée même lui mettait une guêpe dans le nez. Mais, c’est juste une petite folle qui sourit.

— Pas folle, petit-cœur, réfutai-je en secouant la tête. Mais très étrange. Tu demandes pourquoi elle est la créature la plus étrange de toutes ? Regarde la tortue.

La tortue est lente, et porte son armure sur son dos. Son âme est prudente, tout comme son corps est prudent. La vipère cerceau dort dans l’arbre, et frappe quand elle a envie. Son âme est capricieuse et glissante, comme son corps. Chaque oiseau, chaque bête, chaque personne dans Tourbevase agit selon sa nature… sauf Famia.

La crête d’interrogation de la jeune éclose frémit et elle se pencha en avant pour humer la vérité dans mes paroles.

— Mais beaucoup de peaux-douces viennent sur nos terres pour chercher de vieilles statues et des trésors inutiles. Elle collectionne la poterie brisée et les bijoux poussiéreux, comme eux.

— Certes, mais il faut aussi regarder le pourquoi. Beaucoup de peaux-douces viennent nous voler nos terres, nos secrets, et même nos vies. D’autres viennent pour nous éduquer, soi-disant, convaincus que nous sommes des sauvages à cervelle de poisson dépendants de leur sagesse et de leur pitié. Pour le pillard comme pour le missionnaire, nous sommes inférieurs. Nos denrées et nos traditions ne sont qu’un amusement. Mais pas pour Famia.

Je soulevai l’éclose pour la poser sur mes genoux, et couvris son œil gauche de la main.

— Famia voit avec l’œil d’un caméléon, petit-cœur. Un œil tourné vers le chemin sec, pour chercher des ruines moussues, de vieilles cryptes de xanmeers. Toujours, elle examine, elle conserve et elle catalogue. Mais elle ne voit jamais.

L’éclose gloussa et se tortilla sur mes genoux quand je pressai la paume sur son œil droit.

— L’autre œil regarde en aval. Il voit la vérité de notre peuple. Il regarde nos ouvrages, nos chansons et nos traditions, et voit leur beauté, leur dignité. Il aspire à connaître la volonté de l’Hist, comme nous. Et malgré tout cela, ajoutai-je en la reposant à terre, malgré son âme bifide et ses yeux déséquilibrés, Famia vit dans la joie. Elle danse sur la berge de la vie, un pied dans l’eau et l’autre sur le sable. Une enfant sans racine, une enfant partagée.

Je regardai la petite éclose en face, et vis la première étincelle de la compréhension.

— Alors, vois-tu ce qu’elle a de si étrange, à présent ?

Ses lèvres s’ourlèrent en un sourire saxhleel, et elle hocha la tête.

— Oui, deelith. Ce n’est peut-être pas si grave, d’être étrange.