Le sifflet

De La Grande Bibliotheque de Tamriel
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Média d'origine : TES Online

Par Nikolvara


C'est durant l'été de mes treize ans que j’ai découvert le sifflet et mon talent particulier. Depuis longtemps, je pensais disposer d'un talent ignoré qui, en temps voulu, me distinguerait de mes pairs et m'élèverait au-dessus d'eux.

Enfant, je m’entendais mal avec les autres. Par conséquent, j'étais la cible de nombreuses farces et plaisanteries, surtout de la part d’enfants plus grands et plus forts. Ils avaient déjà commencé à se distinguer comme guerriers, bûcherons et d'autres activités physiques, alors que ma faible carrure m’en empêchait. Mais je trouvais de nombreux amis dévoués parmi les animaux, si bien que même dans les moments les plus solitaires, j'étais rarement sans compagnie.

Il advint qu’un des autres enfants qui, comme je l’ai dit, se montraient cruels et profitaient de leur forçe pour me brutaliser, se mit en tête de me jouer un vilain tour. Cela impliquait un sifflet qui produisait une note capable de déchaîner de nombreuses créatures. Les durzogs de nos contrées y étaient particulièrement sensibles. Ils m'amenèrent devant une caverne où une meute de durzogs venait de s'installer, et me firent souffler dans le sifflet sous la menace de leurs poings. Ils étaient bien plus forts que moi, et bien souvent je revenais à la maison en boitillant, après avoir reçu une copieuse raclée de leur part.

Mais, je pense aujourd'hui que la menace d'une volée de coups n'aurait pas suffi à me faire souffler dans le sifflet, s'ils ne m'avaient pas raillée et insultée, me traitant de lâche. Car, bien que mon manque de force physique fut indéniable, j'étais déterminée à montrer que nul n'était plus brave ni déterminée que moi.

Ainsi, choisissant ce que je savais être le pire des deux maux (quoique, devenir la couarde de service me semblait en fait le pire). Je pris le sifflet et en tirai une note forte et claire. Je la maintins plus que de raison, de façon à régler la question de mon intrépidité pour de bon. Mes tortionnaires révélèrent alors leur véritable nature et me supplièrent de cesser de siffler. Ils me demandaient si j'étais folle et disaient que je souhaitais mourir.

Je continuai de siffler, maintenant la note jusqu'à ce que je vis les durzogs sortir de leur antre, montrant les crocs, babines retroussées. Ils se calmèrent lorsque je cessai de siffler. Pendant un moment, nous nous observâmes de façon inquisitrice. Ils n'étaient qu'à quelques pas de moi, semblant attendre un signal. Je portai à nouveau le sifflet à mes lèvres et en tirai une autre note. Les durzogs s'approchèrent davantage, mais leur hargne ne semblait pas être tournée contre moi. En fait, ils semblaient attendre un ordre. Je mis cette hypothèse à l'épreuve en faisant un geste vers le haut, comme je l'avais fait tant de fois avec mes chiens, chez moi. Comme eux, les durzogs y répondirent en se dressant sur leurs arrières, à l'unisson. J'essayai encore, sifflant en faisant les gestes pour "assis" et "couché". Les durzogs obéirent.

Ce spectacle avait chassé la peur du cœur de mes tortionnaires, qui me priaient désormais de les laisser siffler. Ils voulaient commander les durzogs. Je dois avouer que je pris grand plaisir à refuser, car ils m'enviaient enfin et je sentais que j'avais gagné leur respect.

Mais le mieux bâti d'entre eux, un crétin nommé Reggid, me frappa sur le sommet du crâne et prit le sifflet. Je revenais à peine à moi, tant le coup fut puissant, lorsque j'entendis retentir le sifflet, suivi des grognements des durzogs. Alors que ma vision revenait, je vis les animaux se jeter sur lui, mus par une fureur meurtrière. Ils lui sautèrent dessus et arrachèrent sa chair, alors qu'il criait en me suppliant de prendre le sifflet et de rappeler les durzogs. Je n'en fis rien.

Les autres contemplèrent ce spectacle, horriffiés, mais je ne ressentais que de la fierté. Je pensais depuis longtemps que les animaux sentent mieux que nous qui est vertueux et qui ne l'est pas, et ce jour-la mon opinion se vit confirmée.

Une fois leur festin terminé, les durzogs retournèrent dans leur antre pour faire la sieste. Aucun des autres n'osa réclamer le sifflet, et je le garde sur moi depuis ce jour. Je l'utilise pour apprivoiser et dresser les durzogs, partout en Tamriel. Jamais une bête ne se retourna contre moi. Jamais.

Est-il enchanté ? La seule magie du sifflet se trouve dans le talent et le courage que j'y mets.