Le Gâteau et le Diamant

De La Grande Bibliotheque de Tamriel
Aller à : navigation, rechercher
Auteur réel : Ted Peterson
Média d'origine : TES 3 : Morrowind
Commentaire : Texte illustré d'après le Codex.

Par Athyn Muendil


Cakediamant.jpg

J'étais au club du Rat et de la Chope, un établissement étranger d'Ald'ruhn, en train de parler à mes compagnons, quand je vis la femme pour la première fois. Les Brétonnes viennent souvent au Rat et à la Chope : leur nature semble les pousser loin des hauteurs de Hauteroche. Par contre, les vieilles brétonnes n'aiment pas beaucoup sortir de chez elles et cette vieille bonne femme attirait l'attention. Elle parcourait toute la salle et parlait à tout le monde. Après l'avoir remarquée, je rejoignis mes camarades.

Nimloth et Oéliad occupaient leurs places habituelles et buvaient ce qu'ils buvaient d'habitude. Oédiad exhibait une prise qu'il avait obtenue de manière illégale : un énorme diamant, aussi gros que le poing d'un bébé et aussi clair que de l'eau de source. J'étais en train de l'admirer quand j'entendis la vieille derrière moi.

" Bonne journée à vous, mes amis, dit la femme. Je me nomme Abelle Chriditte et je suis à la recherche d'une aide financière pour préparer mon voyage vers Ald Rédaynia.

- Vous devriez vous adresser au Temple pour la charité, répondit crûment Nimloth.

- Je ne recherche pas la charité, dit Abelle. Je cherche à échanger un service.

- Vous allez m'faire pleurer vieille femme, se moqua Oédiad.

- Avez-vous bien dit que vous vous appeliez Abelle Chriditte ? demandai-je. Avez-vous une quelconque relation avec l'Abelle Chriditte de Hauteroche, l'alchimiste ?

- On peut dire ça comme ça, dit-elle avec un rire sec. C'est moi. Peut-être pourrais-je vous préparer une potion en échange d'or ? J'ai remarqué que vous aviez un très beau diamant. Les propriétés magiques des diamants sont extraordinaires.

- Désolé, vieille femme, je ne veux pas me mêler de magie, j'ai déjà eu suffisamment de mal à le voler, dit Oédiad. Un receleur m'en donnera un bon prix en or.

- Mais votre receleur vous demandera un certain pourcentage, n'est-ce pas ? Que diriez-vous d'une potion d'invisibilité en échange ? Contre ce diamant, vous auriez les moyens de voler beaucoup plus de choses. Un échange de services très équitable, à mon avis.

- Cela se pourrait mais je n'ai pas d'or à vous donner, répondit Oédiad.

- Je prendrai ce qui reste du diamant après avoir préparé la potion, dit Abelle. Si vous deviez vous adresser à la guilde des Mages, il vous faudrait fournir tous les autres ingrédients et payer pour obtenir la même chose. Moi, j'ai appris mon art toute seule, dans les régions sauvages où il n'existe pas de fabricants de potions capables de transformer un diamant en poudre. Quand vous devez le faire à la main, en ayant recours à vos seuls talents, vous pouvez récupérer les restes que ces idiots de la guilde gaspillent.

- Cela paraît équitable, dit Nimloth. Mais comment pouvons-nous être sûrs que votre potion fonctionnera ? Si vous ne faites qu'une potion, que vous prenez ce qui reste du diamant et que vous partez, on ne saura pas avant votre départ si la potion marche.

- Ha ! La confiance est si rare de nos jours ! soupira Abelle. Je pense pouvoir faire deux potions et il me restera suffisamment de poudre de diamant. Pas beaucoup, mais assez pour que je puisse rentrer à Ald Rédaynia. Vous pourrez donc essayer la première potion ici même et voir si cela vous convient.

- Mais, intervins-je. Vous pourriez faire une potion qui marche et une autre qui ne marche pas et prendre plus de poudre de diamant. Elle pourrait aussi refiler un poison lent et le temps qu'elle arrive à Ald Rédaynia, tu serais mort.

- Par Kynareth, vous autres les Dunmers, êtes vraiment soupçonneux ! Il ne me restera plus grand-chose du diamant mais je peux faire deux potions avec deux doses chacune pour que vous puissiez constater par vous-mêmes qu'elles marchent et qu'il n'y a aucun effet secondaire. Si vous ne me faites toujours pas confiance, venez avec moi et regardez-moi faire. "

Il fut donc décidé que j'accompagnerais Abelle à sa table, là où elle avait posé toutes ses affaires et son sac plein d'herbes et de minerais, pour être certain qu'elle ne fabriquerait pas deux potions différentes. Il lui fallut environ une heure pour terminer la préparation mais elle m'autorisa généreusement à finir sa carafe de vin pendant que je l'observais. Ce qui demanda le plus de temps fut de briser le diamant et d'en faire de la poudre ; à maintes reprises, elle serra la gemme dans ses mains et récita d'anciens enchantements pour briser la pierre précieuse en fragments de plus en plus petits. Parallèlement elle prépara une mixture avec un émincé de fleurs d'amertume, des bulbes rouges de dell'arco spae broyés et quelques gouttes d'huile de ciciliani. Je terminai le vin.

" Vieille femme, finis-je par dire en soupirant. Combien de temps cela va-t-il encore durer ? Je commence à être las d'observer votre travail.

- La guilde des Mages a trompé la populace en lui faisant croire que l'alchimie était une science, dit-elle. Si vous êtes fatigué, reposez-vous un peu. "

Mes yeux se fermèrent contre mon gré. Il y avait quelque chose dans ce vin. Quelque chose qui me faisait faire ce qu'elle désirait.

" Je pense que je vais préparer cette recette en forme de gâteau. C'est beaucoup plus efficace comme ça. Maintenant, jeune homme, dites-moi ce que vont faire vos amis une fois que je leur aurai donné ceci.

- Ils vous tomberont dessus dans la rue pour récupérer ce qui reste du diamant, répondis-je tout simplement. Je ne voulais pas dire la vérité mais c'était ce que j'avais fait.

- C'est bien ce que je pensais, mais je voulais en être certaine. Vous pouvez ouvrir les yeux maintenant. "

J'ouvris les yeux. Abelle avait disposé ce qu'elle avait préparé sur un plateau en bois : deux petits gâteaux et un petit couteau en argent.

" Prenez les gâteaux et amenez-les à table, dit Abelle. Et ne dites rien mais soyez d'accord avec tout ce qu'ils disent. "

Je fis ce qu'elle m'avait demandé. C'était une sensation étrange. Cela ne me dérangeait pas vraiment d'être sa marionnette. Naturellement, en y repensant, cela me gêne, mais c'était tellement naturel à ce moment-là de lui obéir.

Abelle tendit les gâteaux à Oédiad et je vérifiai que les deux étaient identiques. Elle suggéra qu'il coupe l'un des gâteaux en deux. Elle en prendrait un morceau et lui l'autre pour qu'il puisse être certain qu'ils n'étaient pas empoisonnés et qu'ils étaient efficaces. Oédiad estima que c'était une très bonne idée et utilisa le couteau d'Abelle pour couper le gâteau. Abelle prit la part de gauche et l'avala. Oédiad prit la part de droite et l'avala avec plus de précautions.

Abelle et toutes ses affaires disparurent instantanément. Pour Oédiad, rien ne se produisit.

" Mais pourquoi cela a-t-il marché avec la sorcière et pas avec moi ? gémit Oédiad.

- Car la poudre de diamant ne recouvrait que le côté gauche du couteau ", dit la vieille alchimiste par mon intermédiaire. Je sentais le pouvoir qu'elle exerçait sur moi s'atténuer au fur et à mesure qu'elle s'éloignait en courant dans les rues d'Ald'ruhn.

Nous ne retrouvâmes jamais Abelle Chriditte ou le diamant. Personne ne sait si elle a réussi à se rendre à Ald Rédaynia. Les gâteaux ne révélèrent aucune propriété magique à part celle de plonger Oédiad dans le plus grand abattement pendant une semaine.