Journal de Mairead
Média d'origine : TES Online - Blackwood
[Écriture enfantine et encre délavée] La dame est revenue. Je ne l'aime pas. Elle est méchante ! Enfin, pas méchante. Mais très sévère. Je crois qu'elle ne sourit jamais. Elle ne fait que parler de mon devoir et de ma responsabilité. Je lui ai fait un dessin, et je crois qu'elle n'a pas aimé. Je ne vois jamais d'autre enfant. Est-ce que tous les enfants vivent dans des endroits comme ça ? Est-ce qu'ils ont des mères gentilles et aimantes, comme dans les livres ? Des pères qui sont forts et courageux ? La dame qui vient a l'air trop froide pour avoir des enfants. Je me demande pourquoi elle vient me voir. Je crois qu'elle ne m'aime pas. Elle me dit tout le temps ce que je dois faire ! J'ai essayé de lui faire un câlin, mais elle m'a poussée. Je ne reconnais rien de tout ceci. Bien sûr, je m'y attendais. On m'a fait quitter le seul foyer que j'ai connu, sans même m'expliquer pourquoi. La familiarité est un luxe qui m'est étranger. Mais je m'attendais au moins à trouver ici un certain confort. Je suis toujours seule. Je pensais que ma propre compagnie me suffirait. Mais tout me résiste. Le lit est trop ferme, je me prends les pieds sur les interstices entre les lattes du plancher, et j'ai l'impression que les murs se rapprochent. La femme ne vient plus me voir. Je ne sais pas si elle me manque, ou si je manque l'impression de stabilité qu'elle m'apportait. Bien sûr, je ne regrette pas l'empereur Léovic qui l'accompagnait. J'ai toujours détesté son regard. Déjà enfant, ils hantaient mes rêves. Et maintenant ? Ils me manquent presque. Son regardait pénétrant, inquiétant, mais au moins il était familier. Reconnaissable. J'entends des murmures dans ce nouvel endroit. J'ai quatorze ans, et je suis trop grande pour penser que quoi que ce soit pourrait me faire du mal. C'est tout l'intérêt de loger ici, non ? Enfermée dans une cage, pour que rien ne puisse y entrer ni en sortir ? Mais malgré cela, il m'arrive de me réveiller, le cœur battant. Comme si je m'éveillais d'un cauchemar, sans me souvenir de ce qui m'a tant terrifié. Cela vient peut-être de cet endroit. Ou alors, cela vient de moi. J'ai encore les mains qui tremblent. J'arrive à peine à écrire, mais je dois tout écrire. Je dois tout sortir de ma tête. Si je ne l'écris pas, comment saurai-je que cela a vraiment eu lieu ? Comment pourrai-je me convaincre que ce n'était pas un simple cauchemar ? Tout s'est passé si vite. D'horribles hommes difformes ont essayé de m'emmener. Ils n'ont pas dit pourquoi, mais quelques-uns ont crié un nom que je n'ai pas reconnu. Le valkynaz Nokvroz. J'en croyais à peine mes yeux. Ils étaient si nombreux ! Cette crypte n'avait jamais accueilli autant d'êtres vivants à la fois. J'avais l'impression que les murs tremblaient d'indignation devant cette scène étrange et ce vacarme. Le sang me cognait aux oreilles. Les forces difformes qui envahissaient mon foyer me tiraient par les bras. Je me débattis jusqu'à me faire des bleus. Je frappai, je criai, tout en sachant combien cela pouvait être futile. Personne ne pourrait m'entendre. Combien de fois ai-je crié en ce lieu, consciente que seul l'écho me répondrait ? Mais au moment où je me croyais perdue, quelque chose en moi s'est ouvert. J'ai senti un claquement, comme un fouet dans ma poitrine, et cela a jailli. Je ne sais plus si j'ai ressenti de la douleur, ou rien du tout. La sensation m'a entièrement envahie. Je voulais crier, mais il ne restait pas d'air dans mes poumons. L'espace d'un instant, je n'ai vu qu'une grande lumière. Elle noyait tout, elle envahissait chaque recoin, repoussait toutes les ombres. Puis, plus rien. Lorsque je me suis réveillée, des cadavres jonchaient le sol. Les autres avaient disparu. Une fois de plus, j'étais seule. Je ne sais pas ce qui se passe, mais j'ai le sentiment que quelque chose va changer. À tout jamais. |