Nouveau guide impérial de Tamriel/Val-Boisé : Différence entre versions
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Version du 24 mai 2018 à 16:06
Média d'origine : Édition Impériale de TES Online
Par Flaccus Terentius, de la Société Géographique Impériale, 2E581
Les Elfes des bois du Domaine Aldmeri
On m'a fait monter comme une vulgaire fripouille à bord du premier bateau quittant Prime-Tenure, mais par chance, le Héron nocturne faisait route vers Malabal Tor. Les autres passagers étaient pour la plupart des marchands acariâtres et mon permis de passage ne m'a pas plus servi que s'il avait été écrit en langue draconique. Un autre déporté du nom de Borongothlor m'a indiqué notre destination : le port altmer de Velyn, sur la Côte stridente de Val-Boisé. Nous sommes arrivés sans fanfare. L'administrateur des quais, un individu à l'air suffisant, était en train de lire mon ordre de déportation quand soudain, Borongothlor s'est écrié : « Par la peau d'Hircine ! Une escadre de Maormers ! » Ce n'était pas une ruse : les Elfes marins envahissaient réellement le port et certains avaient même déjà abordé notre bateau. Les gardes ont saisi leurs arcs à la hâte et un combat acharné a éclaté . Les assaillants aux yeux vides et à la peau incolore attaquaient sous le signe du serpent de mer, conjurant ce reptile en plein combat. Il ne leur a fallu que quelques instants pour submerger l'équipage du navire. L'administrateur a soudain lâché mes papiers pour s'agripper la tête, puis il est tombé de l'embarcadère, une flèche plantée dans l'œil. Des centaines d'autres flèches ont assombri le ciel, forçant les gardes à s'abriter derrière de solides barricades. Lors d'une brève accalmie, j'ai vu des silhouettes jaillirent de la forêt.
Les Elfes des bois sont intervenus pour aider leurs frères altmers à repousser les assaillants. On remarque un contraste intéressant entre les Mer de l'océan et ceux des bois : les Maormers utilisent un équipement sophistiqué digne des Hauts-elfes et leurs marins revêtus d'armures intermédiaires font preuve d'une discipline impressionnante, mais fasse à l'agressivité mêlée d'allégresse des Bosmers et à leur virtuosité au tir à l'arc, les Elfes marins ont vite perdu courage et se sont repliés.
Je m'étais prudemment caché dans une chaloupe pendant l'assaut. Quand j'ai osé soulever la bâche pour observer la situation, j'ai assisté à un affrontement farouche sur le quai : une sylve-thane bosmer s'était interposée entre un commandant maormer et son objectif, se jetant sur lui avec son épée à poignée d'os. L'Elfe marin a réussi à parer l'attaque avec une force remarquable, forçant la sylve-thane a reculé. Esquivant facilement son adversaire en armure lourde, elle s'est écriée « Par les os d'Yffre ! » Et lui a enfoncé son poignard dans le bras en riant. Elle s'est retournée immédiatement avec une dextérité brutale, puis son épée s'est abattue sur le cou du Maormer. La tête tranchée du commandant est passée à quelques centimètres de la mienne et son corps s'est effondré, tombant dans l'eau auprès du Héron nocturne. J'ai été surpris d'entendre un deuxième bruit d'éclaboussure : emportée par son élan, l'Elfe des bois avait suivi sa victime dans les eaux rougeoyantes, où elle se débattait maintenant sans la grâce dont elle avait fait preuve précédemment. Instinctivement, je lui a tendu la main pour l'aider à remonter. J'étais plus étonné qu'elle de mon acte de valeur. Après le combat, j'ai raconté mes malheurs à ma nouvelle amie. Comme mes papiers étaient tombés avec l'officier des douanes dans la baie de Velyn, les gardes hauts-elfes ont paru reconnaissants quand Serenarth a proposé de me conduire elle-même à Vieille-Racine.
Serenarth m'a présenté à deux imposants gardiens (je me suis abstenu de leur demander où ils étaient quand on avait besoin d'eux), ainsi qu'au pisteur, au cuisinier, aux porteurs, aux chiens et aux autres membres de sa bande disparate. La caravane transportait des « biens destinés à la délégation Aldmeri » à Vieille-Racine ; c'est tout ce qu'on a bien voulu me dire et cela me suffisait amplement. Le vague sentiment de joie que j'avais ressenti en rencontrant mes nouveaux compagnons s'est rapidement estompé, car au lieu de nous engager sur une route comme je m'y attendais, nous nous sommes enfoncés dans de denses fourrés. Je me suis senti quelque peu mélancolique en pataugeant dans l'eau marécageuse ; je pourrais coller mes peintures du Marais Noir ici sans que mes imbéciles de supérieur se doutent de quoi que ce soit. Val-Boisé est une région sombre, humide et peuplée d'affreuses créatures. Je ne parle pas des Bosmers accompagnant Serenarth, même si leur constante bonne humeur me donnait envie de les étrangler. Non, j'ai vu d'énormes tiques, nommées hoarvors, sortir d'une tanière de feuilles et finir empalées sur la lance d'un Elfe des bois avant qu'elles puissent sucer mon sang. De sinistres spriggans, des êtres végétaux dotés étonnamment de poitrines, nous observaient depuis des clairières sacrées, d'après ce que m'a dit Serenarth.
Formidable, me voilà encore dans un campement humide à les écouter chanter des chansons idiotes sur « les os d'Yffre ». Je commence à croire que Mannimarco contrôle mon destin et joue avec moi dans cette maudite forêt. La cuisine de mes compagnons à autant de saveur qu'une botte d'Orque ; les conserves d'écureuil ne risquent pas d'être la nouvelle sensation culinaire à Bravil. Et l'ours surprise ? La seule « surprise », c'est que mon estomac a réussi à digérer une viande aussi coriace et salée. Nos interactions avec la nature ne m'ont pas non plus rempli de joie. Un buisson a soudain pris vie quand l'un des chiens s'est approché de lui, tentant d'attirer l'animal jusqu'à sa bouche avec ses membres tentaculaires. Les Elfes ont suspendu temporairement le Pacte vert pour libérer leur animal. Au moins, cette plante étrangleuse ne pouvait pas nous poursuivre, contrairement aux vasards sur lesquels nous tombions à chaque traversée de ruisseau ou de marais. Le claquement de leurs pinces et les craquements de leur carapace m'irritaient encore plus. Qu'est-ce que je n'aurais pas donné pour avoir un sort me transportant directement à Vieille-Racine !
Les créatures de Val-Boisé nous ont ennuyé tout le long du chemin, mais ce n'est qu'en arrivant à une cascade que mes guides m'ont demandée de ralentir. Sous la chute se trouvait une nymphe à la beauté éblouissante, qui se baignait en riant dans l'air humide. On m'a appris plus tard qu'il s'agissait d'une néréïde, sans aucun rapport avec les esprits de Hauteroche. J'ai essayé de m'approcher pour l'examiner de plus près, mais l'un des gardes du corps m'a barré le passage et m'a demandé de faire mes croquis de loin.
Les Elfes des bois disent vénérer les arbres, mais cela ne les empêche pas de les manipuler pour former des maisons et des ponts.
La nuit, la ville change du tout au tout (à mes yeux, du moins). Du coin de l'œil, j'aperçois des formes sombres qui s'enfuient aussitôt. D'autres apparaissent fréquemment et ne semblent que trop réelles. Le fantôme de Falarel le bouffon sort des ombres pour me susurrer des plaisanteries dénuées d'humour : « Maître Terentius, on dirait que vous avez pris racine ici ! » Impossible de me débarrasser de cette ombre. Je ne trouve de soulagement que dans la boisson. Dans la communauté des Elfes des bois, l'ivresse n'est pas seulement tolérée, elle est encouragée. J'ai donc entrepris de déguster les diverses liqueurs bosmers. J'ai trouvé le rotmeth rance, la bière vespérale trop faisandée, et quand j'ai découvert que le jagga était du lait de cochon fermenté, j'étais trop ivre pour en être dérangé.
Me voilà obligé de prolonger mon séjour à Vieille-Racine en attendant (impatiemment) un messager impérial du Havre. Je connais Mactator Caprenius depuis qu'il est entré au service de notre famille et il s'est toujours montré ponctuel. Je continue tout de même d'espérer qu'il me sortira de Val-Boisé et me ramènera en Cyrodiil, maintenant que mon guide est presque terminé. En attendant, je passe mon temps à m'apitoyer sur mon sort et à dessiner de manière obsessionnelle. Mon insomnie me prive de sommeil et je passe mes nuits à supporter la torture verbale de Falarel : « Maître, toutes vos volailles ont été tuées. J'en ai la chair de poule ! »
Les plaisanteries de Falarel sont maintenant imprégnés de menaces souvent violentes, qui visent des parties précises de ma personne. Je suis au bord du désespoir. Je ne dors plus depuis plusieurs nuits à cause de ce maudit bouffon. Il n'y aura plus d'extraits du guide impérial de Tamriel, j'ai jeté les dernières pages au feu. Que Stendarr m'accorde sa grâce, car je ne parviens plus à distinguer le jour de la nuit. Au cours de l'une des brèves absences de Falarel, je suis allé voir le prêtre, un Tisseur, et je l'ai supplié de m'aider.
Mon ami Thorongil le Tisseur a décidé de m'emmener voir un arbre qu'Y'ffre considère comme sacré. « Ne sont-ils pas tous sacrés ? » ai-je demandé le plus sérieusement du monde. Il m'a répondu par un gloussement. Son caractère comique s'est révélé davantage quand il m'a demandé de le porter jusqu'à notre destination. J'ai tout d'abord cru qu'il plaisantait, mais il m'a expliqué que les Elfes de son rang se déplaçaient uniquement sur le dos des autres. Heureusement, mes délicates vertèbres ont été épargnées par ses serviteurs, qui l'ont conduit au pied d'un chêne aux branches épaisses planté avant la Première Ère.
Nous nous sommes assis et je me suis mis à dessiner Thorongil en l'écoutant parler. Il m'a révélé ses pensées intérieures et ses communications avec Y'ffre, qu'il transmet ensuite aux sylves-thanes de sa tribu. « Je vous ai raconté l'histoire de mon esprit et de ses changements de perception, » a-t-il expliqué en sortant une pipe en os d'un petit sac. « Maintenant, nous allons altérer notre compréhension du monde physique en inhalant des insectes séchés. » Si cela faisait disparaître mon bouffon fantôme pendant quelques heures, j'étais partant. J'ai inspiré profondément. La fumée avait un effet à la fois répugnant et étrangement apaisant.
Je me suis réveillé seul dans la tente du Tisseur. Je ne m'étais pas senti aussi détendu et insouciant depuis des semaines. Mais quand l'effet de la drogue s'est dissipé et que les longues ombres du crépuscule ont recouvert la clairière, mon moral est retombé. Une douleur familière est revenue quand les flammouches se sont allumées dans leur bocaux. En ouvrant ma chemise, j'ai vu la marque sur ma poitrine se mettre à remuer, comme si des vers grouillaient sous les cicatrices. L'un des trophées du Tisseur, une sorte de crâne, accroché à un poteau, s'est mis à claquer du bec. J'ai eu l'impression que la tente tournait et se refermait sur moi. Et soudain, tout est devenu noir.
Fatigué. Seul dans la forêt en pleine nuit. J'avais dû marcher dans mon sommeil pendant un bon moment. Les rayons de Masser et Secunda traversait la ramure des arbres. J'étais entouré de racines tordues et de formes indistinctes, si rapides qu'elles disparaissaient avant que je puisse les suivre du regard. Il y avait une brume en moi, comme si j'étais très loin. D'étranges cliquetis et le bourdonnement des insectes. Les froissements assourdis d'animaux de la forêt. Ces bruits ne me perturbent plus. De terribles visions envahissent mon esprit et je dois me retenir de hurler. J'ai l'étrange impression d'avoir suivi quelqu'un. Je ne veux pas savoir de qui il s'agit. Pour me changer les idées, je me suis assis et j'ai peint la jungle de minuit.
La main avec laquelle je peins semble moins arthritique et presque ensorcelée. Après avoir terminé l'illustration de la jungle nocturne, j'ai tourné la page et commencé une nouvelle peinture, couvrant le parchemin des nuances bleues et grises comme si j'étais possédé. Un paysage différent s'est matérialisé progressivement sous mes coups de crayon et de pinceau. Mais comment puis-je connaître cet endroit ? Il s'agissait du monde froid et mort que j'avais vu dans mes cauchemars et que j'avais tenté d'oublier en buvant. La terre gelée et craquelée, les silhouettes noires tapies juste en dessous de la surface. Étais-je condamné à errer dans ce monde perdu ? Non, j'étais toujours à Val-Boisé. Je me suis resservi en jagga et en sangrelle pour ne plus penser à ces horreurs. Elles sont revenues d'un coup. D'énormes brutes daedriques à l'aspect reptilien me chassaient dans ce paysage. Je n'ai pas pu m'empêcher de les dessiner elles aussi
D'étranges personnages au visage animal ou coiffé de têtes d'animaux sortent de l'ombre et me regardent travailler. Ils m'observent attentivement et marmonnent entre eux en hochant la tête de temps en temps. Parfois, je vois les crânes d'oiseaux ornant leurs armures se tourner vers moi pour me regarder avec leurs orbites vides. Sont-ils vraiment réels ?
Quand le sommeil et est enfin venu, j'ai rêvé de ma patrie. Mais contrairement à la province paisible que j'avais quittée il y a plusieurs mois, Cyrodiil était maintenant en détresse, déchirée par la guerre. Le mur d'enceinte du château de Bravil était bombardé par les machines de siège d'une armée d'envahisseurs. Les appartements du conseiller Lucasta ont été réduits en miettes et les fantassins ennemis ont déferlé dans la cour du château, massacrant gardes et innocents sans discernement. Ma maison était en feu. J'ai vu mon frère, l'épée à la main, tituber dans la fumée et les braises, tirant un corps calciné. Puis il est retourné dans les flammes. Non, mon frère ! Sauve-toi ! Réveille-toi, imbécile. Un visage maléfique gravé dans une pierre noire me regarde d'un œil méchant, exprimant son approbation par une grimace.
Mes cauchemars envahissent Tamriel, inondant mon monde d'effroyables ténèbres. Je dois être en train de dormir, de telles horreurs ne peuvent exister sur Nirn. Et pourtant, je suis bien ici et je peins cette scène comme si elle était réelle pour la montrer à tous. J'ai eu une terrible vision de Val-Boisé en cendres. Des cadavres d'Elfes des bois brûlent près de leurs maisons ravagées. Les chênes-grahts millénaires ne sont plus que des amas d'écorces fumantes. Tous ont souffert. Des individus portant des capes noires et des casques rouges… S'agit-il d'adeptes du Ver patrouillant ces terres de cendres ? Une silhouette en robe observe la situation ; j'aperçois un ver qui se tortille sur son bâton. Puis il s'en va à grands pas en foulant les braises du monde. Mannimarco ? Réveille-toi ! Réveille-toi ! Le visage maléfique se fend d'un rictus diabolique.
Suis-je éveillé ?
Je suis de nouveau conscient de mon somnambulisme. Je me trouve à présent dans le monde de cauchemar que je m'étais efforcé de confiner entre les murs de mon sommeil. Un village bosmer a été profané et détruit. Il est maintenant décoré de peaux, d'os et d'autres symboles des adorateurs de Deadra et des nécromanciens. Pour la première fois, je sens aussi l'odeur du bois et de la chair en feu. Je suis obligé de me couvrir la bouche avec un morceau de tissu pour calmer mes haut-le-cœur. Pour couronner le tout, ce maudit fantôme revient me railler. « Bonne nouvelle, Maître. J'ai mis le feu aux forêts et brûlé tous vos ennemis de Val-Boisé. » « Mais Falarel, » ai-je réussi à répondre, « je n'ai pas d'ennemis à Val-Boisé. » « Maintenant, si ! » La chair sous ma marque s'est mise à remuer. Je l'ai agrippée fermement, de crainte qu'elle ne s'ouvre brutalement. « Bienvenue, Flaccus Terentius, » a dit Falarel de la voie de Mannimarco. « Bienvenue à Gil-Var-Delle. »
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