Nouveau guide impérial de Tamriel/Marais Noir : Différence entre versions
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|texte={{Lettrine|L}}es érudits impériaux estiment que la Bataille d'Argonie et la conquête du Marais noir datent d'1E2811. Pour la première fois, une race humaine prenait le pouvoir dans cette région... Mais les érudits omirent de mentionner que c'était une zone complètement impénétrable. L'éclaireur impérial Tutor Acilius, il est vrai, décrivit ces marécages comme « une soupe de tourments et d'infections où une goutte d'eau suffit à vous vider les intestins. » La cité d'Helstrom, au cœur impénétrable de ces terres, n'a jamais essuyé de siège : l'empire s'est contenté d'annexer les régions frontalières du nord et de l'ouest. En effet, ces étendues côtières furent transformées en colonies pénitentiaires à peine habitables. C'est là que rôdaient jadis les criminels de Tamriel. Il n'est pas étonnant que d'autres arrangements de ce type aient été noués ailleurs dans ce bourbier géant : à Fort-Tempête. | |texte={{Lettrine|L}}es érudits impériaux estiment que la Bataille d'Argonie et la conquête du Marais noir datent d'1E2811. Pour la première fois, une race humaine prenait le pouvoir dans cette région... Mais les érudits omirent de mentionner que c'était une zone complètement impénétrable. L'éclaireur impérial Tutor Acilius, il est vrai, décrivit ces marécages comme « une soupe de tourments et d'infections où une goutte d'eau suffit à vous vider les intestins. » La cité d'Helstrom, au cœur impénétrable de ces terres, n'a jamais essuyé de siège : l'empire s'est contenté d'annexer les régions frontalières du nord et de l'ouest. En effet, ces étendues côtières furent transformées en colonies pénitentiaires à peine habitables. C'est là que rôdaient jadis les criminels de Tamriel. Il n'est pas étonnant que d'autres arrangements de ce type aient été noués ailleurs dans ce bourbier géant : à Fort-Tempête. | ||
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''On m’enferma dans une enclave des Sombres-écailles, et on fit la sourde oreille à mes cris de protestation. Si l’on peut parler d’oreilles pour les orifices latéraux qu’arboraient mes ravisseurs.'' | ''On m’enferma dans une enclave des Sombres-écailles, et on fit la sourde oreille à mes cris de protestation. Si l’on peut parler d’oreilles pour les orifices latéraux qu’arboraient mes ravisseurs.'' | ||
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Version du 13 mars 2019 à 10:54
Média d'origine : Édition Impériale de TES Online
Par Flaccus Terentius, de la Société Géographique Impériale, 2E581
Argoniens du Pacte de Cœurébène
Dès que j’aperçus la gardienne Heita-Meen dans son bâtiment administratif, je la reconnus à son museau pointu et aux motifs concentriques ornant les boucles de son armure de guerre. Elle était représentée dans le tableau du Pacte de Cœurébène que j’avais déniché dans la bibliothèque du manoir Kragen, en Morrowind. Ses quartiers au sein de la forteresse désorganisée de Fort-Tempête non pas l’envergure ni la magnificence des autres capitales de Tamriel, mais c’est bien compréhensible au vu des récents événements. Heita-Meen, qui portait en tant que magistrat le titre de vice-chanoine, devait rendre son verdict dans une affaire impliquant deux Dunmer aux mines déconfites et appartenant à la Maison Drès, récemment dissoute. Et dire qu’il y a moins d’une génération de cela, j’aurais pu faire l’acquisition d’un Argonien pour mes besoins personnels. Cette époque est révolue : les Elfes noirs ayant trempé dans le commerce d’esclaves ont été condamnés à un an de prison, dans des cages suspendues aux arches des Ayleids. Les éventuels survivants seront bannis du Marais noir. Meeleeh-Een, mon ami argonien, les a traités de « stupides peaux-sèches » et de « racines flétries », ce qui semble indiquer qu’il ne les porte pas dans son cœur. « Loin de toi, sécheresse » me dit Meeleeh-Een en guise d’adieu.
« La présence des Impériaux est tolérée ici, » déclara Heita-Meen. Elle me fit signe d’approcher de son poignet grêle, un geste qui trahit une longue pratique du combat au bâton. L’espace d’un instant, j’ai cru déceler du dédain dans sa voix, mais je me souvins qu’il ne fallait pas y voir un manque de correction : tout ceux de sa race me traitaient avec froideur. Mais on m’avait inculqué les bonnes manières et ce traitement me dérangeait. « Voici Vertèbre-Solitaire, un frère de couvée. Il vous aidera au quotidien. » Elle fit signe à un jeune Argonien, chargé de m’escorter dans tous les déplacements à Fort-Tempête. Ce dernier m’expliqua qu’il avait été esclave (ou, pour reprendre ses termes, « une plante étouffée par ses racines dans la terre de mes ancêtres, aujourd’hui libre de fleurir »). Je trouvais ses intonations mélodieuses à la fois irritantes et apaisantes, bien qu’il ne parlât pas le Jel, la langue de ses géniteurs : il avait grandi dans les affreuses plantations de riz de sel de Morrowind. Il m’expliqua qu’il était un Argonien Lukiul et qu’il connaissait bien les us et coutumes de Tamriel. Il me mit en garde contre les Saxheel, les habitants d’origine du Marais noir, car ces derniers se méfiaient, à juste titre, des visiteurs. Nous prîmes la direction des baraquements. J’espérais rencontrer davantage de Lukiul. Sous nos yeux, un sergent nordique à la carrure imposante et transpirant à grosses gouttes dans la chaleur ambiante effectua une série de manœuvres de combats fluides et étourdissantes avec sa jeune compagnie de Dos-de-fer, les troupes d’infanterie argoniennes. Vertèbre-Solitaire adressa un signe à un reptile qui observait la scène depuis le rempart, un capitaine et vétéran de la campagne akaviroise qui supervisait les stratégies militaires. Le capitaine fronçait les sourcils. Une profonde cicatrice traversait l’une de ses orbites. Alors que les soldats apprenaient à coordonner leurs déplacements, Vertèbre-Solitaire m’expliqua qu’on entraînait les Dos-de-fer à se battre aux côtés des troupes d’infanterie lourde nordiques et dunmers. Jusqu’à présent, je pensais que les Argoniens faisait d’excellents éclaireurs, se spécialisaient dans les petites escarmouches et ne supportaient pas de se battre en formation. Ces hommes-lézards ont des capacités d’adaptation bien supérieures à ce que j’aurais cru.
Nous avons tort de mépriser l’équipement de combat argonien. J’ai observé les officiers nordiques et argoniens échanger des passes à l’arme blanche émoussée pour montrer certains coups aux nouvelles recrues, et j’ai été impressionné par la dextérité et l’habileté de ce prétendu sauvage. Mais c’est son armure de crocodile qui le protégeait efficacement contre les coups répétés de l’imposant Nordique. Par contre, je n’éprouvais aucune admiration pour l’architecture argonienne. Dans d’autres cultures, on érige des temples étincelants qui traversent les siècles en honneur de l’homme, de l’Elfe et de leurs aspirations. Mais ces huttes de terre ridicules, dans lesquelles j’ai eu le malheur de séjourner, semblaient se désagréger à vue d’œil dans les marécages suintants. C’est du clayonnage, ni plus ni moins. Même un Bréton sait pertinemment qu’une habitation dotée de fondations en pierre est supérieure à ce torchis humide. Vertèbre-Solitaire me fit remarquer que les Argoniens appréciaient tout particulièrement cette boue « bénie par le soleil ». Autre chose, les plumes : impossible d’aller où que ce soit sans se sentir agressé par un totem tribal de bois, de terre et de plumes semblable à un golem difforme. Je serai peut-être le premier étranger à dessiner les armures lourdes et les armes des Argoniens avec une telle précision. Cela devrait convaincre les incrédules de la sophistication de leur équipement. L’assemblage de peau de reptile, de métal, de carapace et d’os donne quelque chose de plus résistant et léger qu’une armure d’acier. Les avantages de cette technique sont nombreux. La preuve unique mais suffisante m’en fut donnée lorsque j’aperçus un homme–lézard nager sans aucune peine avec son armure sur le dos. Vertèbre-Solitaire me proposa de prendre un bain, « une vraie chance de tâter la vase », mais je refusai poliment. Je souffre déjà de maux de ventre et d’une toux grasse.
Après avoir passé une nuit dans la hutte de boue de Vertèbre-Solitaire, je peux affirmer que l’architecture argonienne est aussi répugnante qu’on le devine sur ces croquis. Les murs ont tendance à suinter sous l’effet de l’humidité (c’est-à-dire, en permanence), et l’odeur dépasse les mots ! On n’en vient à se demander ce que les hommes-lézards utilisent en guise de ciment. Je n’ai pas pour habitude de me perdre en conjectures, mais je suis presque certain d’avoir reconnu des excréments séchés mélangés à la boue entourant les fenêtres. J’ai pour mission d’explorer en profondeur chaque endroit que j’estime important pour les affaires impériales. Il fallait que je m’aventure au cœur des marais, où la peste Knahataine fait toujours des ravages. Vertèbre-Solitaire manifestait une certaine réticence : « Méfiez-vous, ces eaux sont troubles. » Après de longues négociations, mon pouvoir de persuasion (et une pièce de monnaie assortie d’un moulin à prière Tu’whacca) finirent par le convaincre. Demain, nous nous aventurerons jusqu’aux bassins d’éclosion argoniens, et j’ai bien l’intention d’inspecter l’une des légendaires Xanmeers, les curieuses pyramides érigées par les Saxheel en des temps immémoriaux, et de faire un croquis de l’énorme arbre à Hist.
Notre séjour dans le bourbier commencera à l’aube : Vertèbre-Solitaire a passé la journée à rassembler l’équipement dont nous aurons besoin pour aller au cœur du marais, pendant que je m’efforçais d’imperméabiliser mes bottes nordiques et de soigner les mycoses de mes orteils. Je n’ai pas eu trop de mal à percer chaque pustule. Ensuite, j’ai rapidement ouvert mes pots de peinture pour capturer le chargement de notre petite caravane. Un bâton de profondeur : très utile pour faire la différence entre les petites flaques et les bourbiers prêts à nous engloutir. Des bourgeons de fleurs séchés, pour purifier l’eau : les effluents dans lesquelles je patauge risquent de me contaminer par simple contact, autant éviter d’en boire. Vertèbre-Solitaire est revenu avec une tente de Lukiul. Il me dit en guise d’explication : un peau-sèche comme vous n’aura pas forcément envie de se terrer dans la boue pour passer la nuit. » Quelle perspicacité. J’avais imperméabilisé et enchanté mes meilleures bottes nordiques… pour ça ? Lorsque j’ai quitté Fort-Tempête, (en direction du Marais – mère, au nom si évocateur), le sol était plus ferme qu’une route pavée brétonne ou qu’une chaussée, mais on m’a parlé depuis d’une région à ce point inondée qu’elle pourrait bien nous engloutir. Vertèbre-Solitaire m’a offert une crème émolliente nauséabonde, à appliquer sur les avant-bras, le visage et toutes les extrémités non protégées. Elle aurait pour effet d’éloigner les mouches parasites. C’est sûrement vrai : maintenant, seuls les insectes les plus gros osent me piquer. Une créature ailée et iridescente m’a déjà trouvé succulent.
Nous progressons rapidement, malgré les piqûres d’insectes et l’humidité. Nous nous étions même presque habitués à l’odeur de la crème éloignant les mouches lorsque nous arrivâmes en vue du Marais–mère. Les arbres drapés de mousse et les buttes herbeuses bruissaient de milliers d’insectes invisibles. Secunda beignait de sa lumière les ruines de ce temple déchu, qui avait dû se dresser fièrement jadis. Ces tours antiques s’avéraient plus complexes qu’on ne l’aurait cru possible. On y voyait d’étranges silhouettes. Quelques divinités inconnues ? Vertèbre-Solitaire ne put rien me dire. Ma peinture se basera donc que sur mes conjectures. La colère et l’inquiétude me submergent maintenant que mon chevalet de prédilection a été à moitié avalé par un crocodile. Je m’étais installé pour peindre au bord du Marais–mère - mais à l’intérieur des murs de la ville - et je mettais la touche finale à quelques croquis préliminaires (aujourd’hui perdus) lorsqu’une créature sortit en rampant des eaux stagnantes et s’approcha de moi : ce démon aux crocs aiguisés est plus long que deux hommes se précipita sur moi à une vitesse insensée. Un long museau et de grosses dents balayèrent le vide à l’endroit précis où se tenait ma jambe. Des peintures, pinceaux et parchemins volèrent en tous sens. Vertèbre-Solitaire étend souffrant, aux latrines, je repoussai seul deux attaques de mâchoire avec un mélange de dextérité et de cris paniqués. Ensuite, je forçai la bête à dévorer mon chevalet, jusqu’à ce qu’elle reparte en rampant. Comment les hommes–lézards font-ils pour repousser ce genre d’attaques, en particulier dans une zone urbaine ? Où sont les gardes ?
Je décidai de dessiner autre chose et cessai de perdre du temps à explorer les ruines du Marais-mère. Ces ruines sont à la fois immenses et pleines de recoins. J’entendrais presque les cris haletants des ancêtres de Vertèbre-Solitaire résonner dans les cénotaphes et les barbacanes. Comme me l’a dit Vertèbre-Solitaire, « mes ancêtres murmurent encore ici, comme les roseaux qui se balancent en vifazur. » Le monument le plus splendide parmi toutes ces pierres et la pyramide à degrés, ou « Xanmeer », qui domine l’ensemble. Toute la zone est « Xal », ce qui signifie « sacrée » dans leur langue râpeuse.
Nous nous étions enfoncés très loin au cœur de Fangeombre. Alors que j’appliquais un onguent sur mes irritations, je me souvins avoir lu quelque chose au sujet des bassins d’éclosion argoniens. Je posai une question à ce sujet. « Nous y sommes presque. L’un d’entre eux se trouve à la distance d’un territoire de crocodile. Mais Vertèbre-Solitaire pense que vous envisagez de piller les lieux. Ce ne serait pas très humide de votre part. » Mon aide se rebiffait presque. « Écoutez, je vous ai donné un moulin à prière Tu’whacca - et un vrai - en échange de vos services, c’est amplement suffisant. Vous avez également eu une pièce, et ma compagnie. J’ai même supporté sans rien dire vos allégories sur la nature. Nous partons immédiatement pour l’arbre à Hist. » « La contrariété me dessèche la peau », me répondit-il, le museau replié sur lui-même. « Alors profitez qu’on avance dans la vase pour humidifier vos pieds, » lui répondis-je en lui jetant une autre poignée de pièces. Bientôt, nous pataugions en direction du saint des saints du Marais noir.
« Xuth. Intrus. » Un gardien argonien surveillant les bassins se tourna vers moi et me parla d’une voix forte. Il prononça des invocations en direction du bourbier. Une nuée de petits points évoquant d’étranges spores sortit de l’eau pour tracer des cercles autour de la tête du Gardien. Je battis précipitamment en retraite. Par chance, le Gardien se tourna vers Vertèbre-Solitaire et dit : « Au bout du compte, tout le monde nourrit les racines de l’Arbre. Serait-ce ton tour ? » Un instant plus tard, l’Argonien était tombé à genoux et se tordait de douleur, au milieu d’un nuage de spores. Une fois de plus, veuillez pardonner le manque de précision de mes souvenirs. J’étais bouleversé, transi de peur et il faisait si sombre que je ne voyais pas où je mettais les pieds. Alors que le corps de Vertèbre-Solitaire disparaissait au loin, je paniquai et partis en courant vers notre dernier camp. Mais je n’avais plus aucun repère et j’errai dans le noir d’un pas chancelant.
C’est alors que j’aperçus une lumière bleue et vacillante. Je hurlai pour qu’on me vienne en aide et m'élançai dans sa direction. Dès que je compris ce dont il s’agissait, je bondis sur la terre ferme. Ce n’était pas une lanterne, mais la décharge électrique intermittente provenant de la colonne vertébrale d’un énorme lézard au corps noueux de la taille d’un tronc d’arbre. J’eus de la chance : Arkay ne réussit pas à me convoquer. La chose–dragon semblait lutter contre, et mordre, les trois feux follets les plus immenses qu’il m’ait été donné de voir.
Panique. Perdu dans des marécages sans début ni fin, je sentis le stigmate m’élancer. Les guêpes abandonnèrent la poursuite lorsque je pénétrai dans une morne et mystérieuse clairière. Instinctivement, je frissonnai. L’humidité me perçait jusqu’à l’os. Privé de la moindre parcelle de chaleur, j’observais trois lumières qui dansaient devant moi. Il s’agissait de feux follets qui tremblotaient et voletaient autour de mon corps secoué de frissons. Puis j’aperçus une silhouette. C’était une femme gracile et superbe qui prenait forme à partir des vapeurs indistinctes. Je tendis le bras dans sa direction. Elle me fit signe de la rejoindre. L’esprit embrumé, j’obtempérai. Je voulais qu’elle me prenne dans ses bras. Ses yeux si doux… Une douleur glaciale me terrassa et je serrai le poing contre mon stigmate. Je vis alors la femme esquisser une grimace, se tordre et reculer. Son visage n’était plus que haine. Était-il écrit que je devais mourir à cet endroit ? Non. Un ricanement suraigu me vrilla les tympans. Je me tournai à moitié pour chercher qui avais émis ce bruit, mais j’avais déjà la réponse. Mannimarco cherchait à me tourmenter, même ici. Je secouai la tête, mais il était vain de vouloir faire taire le rire du marionnettiste qui résonnait dans mon crâne. Je pataugeai plus avant, désespéré.
Il y eut un silence, puis le sang se mit à bourdonner dans mes tempes. Je fis quelques pas hésitants mais décidés en direction de la berge. J’avais découvert un étrange autel… dédié à un dieu serpent ? Je venais de commencer à dessiner lorsque le serpent le plus énorme jamais vu dans le Marais noir fondit sur moi. Mû par l’instinct, je pris mes jambes à mon cou et, Stendarr soit loué, atteignis un chemin. Je reprenais mon soufflant lorsque deux minces silhouettes encapuchonnées surgirent de la brume qui rasait le sol. Une main couverte d’écailles vint se plaquer contre mon visage. « Éclaireur impérial et esclavagiste, vous cherchez à ternir nos feuillages de vos moisissures. » Le ton de cette voix était menaçant. Des robes rouges et noires, des lames qui captaient l’éclat des torches dans le crépuscule naissant. J’espérai presque que le serpent surgît derrière moi. « C’est une méprise. Je suis l’Émissaire-érudit de… » L’Argonien vêtu d’un capuchon me fit signe de tendre l’oreille : « Nous sommes au courant. » « Dans ce cas, j’exige que vous me lâchiez et que… » Une lame noire comme l’ébène se posa contre ma gorge, et une seconde sensiblement plus bas. Le Sombre-écailles répondit dans un chuintement : « il paraît que les membres coupés des Impériaux ne repoussent pas. Dois-je le vérifier par moi-même ? »
On me traîna jusqu’à Fort-Tempête pour que j’y réponde des crimes que j’aurais commis. Je peux, j’imagine, m’estimer heureux qu’on ne m’ait pas assassiné avant que les Sombres-écailles ne cherchent à vérifier mes dires. Mais la vice-chanoine Heita-Meen s’est portée garante de mon innocence et on m’a livré aux autorités, à contrecœur, bien qu’il n’y eût ni excuses en bonne et due forme, ni avertissement. Qu’Akatosh me foudroie si je retourne visiter de nouvelles régions dans cette fosse septique humide et nauséabonde. C’est avec soulagement que je quitte le Marais noir. Demain, je pars pour Noirbois et je traverse Cyrodiil.
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