Le Mystère de la Princesse Talara, livre III
Auteur réel : Ted Peterson Média d'origine : TES 3 : Morrowind
Par Mera Llykith
Gnorbooth quittait son pub favori à Camlorn, La Branche brisée, quand il entendit quelqu'un le héler. On ne pouvait pas se tromper avec son nom. Il se retourna et vit le seigneur Eryl, le mage de guerre royal du palais, qui venait d'émerger d'une allée sombre. - Monseigneur, dit Gnorbooth avec un sourire avenant. - Je suis surpris de vous voir ce soir, Gnorbooth, grimaça le seigneur Eryl. Je ne vous ai pas beaucoup vus, vous et votre maître, depuis la célébration du millénaire mais je crois savoir que vous avez été très occupés. Mais je me demande bien ce qui pouvait réclamer autant votre attention ? - La protection des intérêts impériaux à Camlorn est un travail de longue haleine, monseigneur. Mais je doute que vous vous intéressiez aux détails des rendez-vous de l'ambassadeur. - Et pourtant si, répondit le mage de guerre. Particulièrement depuis que l'ambassadeur se comporte de manière étrange, de manière peu diplomatique à vrai dire. Et je crois savoir qu'il a recueilli dans sa demeure une des catins du festival des Fleurs. Je crois qu'elle s'appelle Gyna ? Gnorbooth haussa les épaules : - Je dirais qu'il est amoureux, monseigneur. L'amour peut conduire les hommes à se conduire de manière très étrange, comme vous le savez très certainement. - C'est la plus charmante des courtisanes, plaisanta le seigneur Eryl. Avez-vous remarqué comme elle ressemble à la regrettée princesse Talara ? - Je ne suis à Camlorn que depuis quinze ans, monseigneur. Je n'ai jamais vu Sa regrettée Altesse. - Maintenant, je pourrais comprendre qu'il se lance dans la poésie mais quel genre d'homme amoureux passerait ses jours dans les cuisines du palais à interroger tous les vieux serviteurs ? Cela n'évoque guère une passion débordante même en me référant à mon expérience des plus limitées dans ce domaine. Le seigneur Eryl roula des yeux. Quelle est cette affaire dans laquelle il s'est lancé... Oh ! Quel est le nom de ce village déjà ? - Umbington ? répondit Gnorbooth en se mordant les lèvres juste après. Le seigneur Eryl était trop malin pour le montrer mais Gnorbooth savait au fond de lui que le mage de guerre ignorait que le seigneur Strale avait quitté la capitale. Il fallait qu'il prévienne l'ambassadeur mais la partie n'était pas encore terminée : il ne part pas là-bas avant demain matin. Je crois que c'est juste pour aller apposer le sceau impérial sur un ouvrage quelconque. - Est-ce tout ? Que cela doit être assommant. Je pense que j'aurai l'occasion de le rencontrer à son retour, dit Eryl en saluant. Merci d'avoir été si coopératif. Au revoir. Au moment où le mage de guerre tournait au coin de la rue, Gnorbooth sauta sur son cheval. Il avait bu un ou deux verres de trop mais il savait qu'il devait atteindre Umbington avant les agents du seigneur Eryl. Il galopa en direction de l'est en espérant qu'il trouverait des poteaux indicateurs sur la route. Assis dans une taverne qui sentait le moisi et la bière rance, le seigneur Strale s'extasiait de ce que l'agent de l'empereur, dame Brisiénna, dénichait toujours un endroit public pour ses rapports les plus privés. C'était le temps des récoltes à Umbington et tous les ouvriers agricoles dépensaient leurs maigres salaires en boisson et de la manière la plus bruyante qui soit. Strale portait un costume de circonstance, une simple veste de paysan et un pantalon commun, mais il avait tout de même l'impression de ne pas passer inaperçu. En comparaison avec les deux femmes qui l'accompagnaient, c'était certainement vrai. La femme à sa droite était habituée à fréquenter les endroits les plus sordides de Daguefilante en tant que prostituée. Quant à dame Brisiénna, à sa gauche, elle était clairement dans son élément. - Par quel nom préférez-vous que je vous appelle ? demanda dame Brisiénna. - Je suis habituée au nom de Gyna bien que cela puisse changer, répondit-elle. Bien entendu, cela peut ne jamais arriver et Gyna la catin pourrait bien être mon épitaphe. - Je ferai en sorte que plus personne n'attente à votre vie comme lors du Festival des Fleurs, répondit le seigneur Strale. Mais, sans l'aide de l'empereur, je ne pourrai pas vous protéger éternellement. La seule solution est de capturer ceux qui vous veulent du mal et de vous rendre votre titre. - Vous croyez donc à mon histoire ? demanda Gyna en se tournant vers dame Brisiénna. - Je suis le principal agent de l'empereur à Hauteroche depuis de nombreuses années et j'ai entendu pas mal d'histoires étranges. Si notre ami l'ambassadeur n'avait pas enquêté et découvert ce qu'il a découvert, je vous aurais considérée comme une folle, ricana Brisiénna, ce qui fit sourire Gyna. Mais maintenant, je vous crois. C'est peut-être moi la folle après tout. - Nous aiderez-vous ? demanda simplement le seigneur Strale. - Il est délicat de se mêler des affaires des royaumes provinciaux, dit dame Brisiénna en regardant le fond de son verre. Si cela ne menace pas l'empire, nous préférons généralement ne pas intervenir. Ce qui nous préoccupe dans votre cas, c'est une sale affaire d'assassinat remontant à vingt ans, et ses conséquences. Si Sa Majesté Impériale se mêlait de toutes les affaires de succession dans chacun de ses milliers de royaumes vassaux, elle n'accomplirait rien pour le plus grand bien de Tamriel. - Je comprends, murmura Gyna. Quand je me suis souvenue de tout, qui j'étais et ce qui m'était arrivé, j'étais résolue à ne rien y changer. En fait, je quittais Camlorn pour rentrer à Daguefilante quand je revis le seigneur Strale. C'est lui qui s'est lancé dans cette quête, pas moi. Et quand il m'a ramenée, je voulais juste voir ma cousine pour lui dire qui j'étais mais il me l'a interdit. - Cela aurait été trop dangereux, grogna Strale. Nous ignorons encore l'importance de cette conspiration. Peut-être ne le saurons-nous jamais. - Je suis navrée, je réponds toujours par de longues explications aux questions les plus simples. Quand le seigneur Strale m'a demandé si j'aller vous venir en aide, j'aurais dû commencer par dire oui, ajouta dame Brisiénna en riant à la vue du changement d'expression sur les visages de Strale et de Gyna. Je vous aiderai, naturellement. Mais pour que tout se déroule bien, vous devez remplir deux conditions pour satisfaire l'empereur. Tout d'abord, vous devez prouver de manière formelle qui se cache derrière le complot. Il faut que quelqu'un avoue. - Et deuxièmement, dit le seigneur Strale en hochant la tête, nous devons prouver que cette affaire est digne de la considération de Sa Majesté Impériale et pas uniquement une petite affaire locale. Le seigneur Strale, dame Brisiénna et la femme qui se faisait appeler Gyna continuèrent à discuter pendant des heures sur le moyen d'atteindre leur objectif. Quand ils tombèrent d'accord sur ce qu'il convenait de faire, dame Brisiénna prit congé pour rejoindre un allié nommé Proséccus. Strale et Gyna partirent vers l'ouest, vers Camlorn. Peu de temps après avoir pénétré dans la forêt, ils entendirent le bruit d'un cheval lancé au galop, loin devant eux. Le seigneur Strale tira son épée et indiqua à Gyna de se mettre derrière lui. À cet instant, ils furent attaqués de tous côtés. C'était une embuscade. Huit hommes armés de haches les guettaient. Le seigneur Strale agrippa Gyna et la déposa derrière lui. Il fit un geste de la main et un anneau de feu se matérialisa autour d'eux avant de s'élargir en direction des attaquants. Les assaillants hurlèrent de douleur et tombèrent à genoux. Le seigneur Strale fit sauter son cheval au-dessus du plus proche et le lança au galop vers l'ouest. - Je pensais que vous étiez un ambassadeur et non un mage ! dit Gyna en riant. - Je reste persuadé qu'il y a encore des moments où l'on peut se montrer diplomate, répondit Strale. Le cheval qu'ils avaient entendu auparavant arriva à leur hauteur. C'était Gnorbooth. - Monseigneur, c'est le mage de guerre royal ! Il a découvert votre présence à Umbington ! - Très facilement, pourrais-je ajouter, cria le seigneur Eryl dissimulé dans les bois. Gnorbooth, Gyna et le seigneur Strale scrutèrent la sombre forêt mais ils ne virent rien. La voix du mage de guerre semblait provenir de partout et de nulle part à la fois. Je suis navré, monseigneur, gémit Gnorbooth. J'ai tenté de vous prévenir aussi vite que possible. - Dans votre prochaine vie, peut-être vous souviendrez-vous de ne pas vous confier à un ivrogne ! se moqua le seigneur Eryl. Il les voyait désormais et il lança son sort. Gnorbooth le vit en premier grâce à la lueur de la boule de feu qui jaillissait de ses doigts. Plus tard, le seigneur Eryl se demanda ce que cet idiot avait voulu faire. Peut-être s'était-il précipité en avant pour écarter le seigneur Strale de la trajectoire. Peut-être avait-il essayé de fuir et avait-il choisi le mauvais côté pour cela. Peut-être, aussi incongru que cela puisse paraître, avait-il tenté de se sacrifier pour sauver son maître. Quelle que soit la raison, le résultat fut le même. Il s'interposa. Il y eut une explosion qui emplit la nuit et un grondement sourd qui fit trembler les oiseaux dans les arbres à des kilomètres à la ronde. Là où se trouvaient Gnorbooth et son cheval ne restait rien d'autre qu'un sol vitrifié. Ils avaient été désintégrés. Gyna et le seigneur Strale avaient été violemment désarçonnés. Leurs chevaux, une fois le choc passé, s'étaient mis à galoper aussi vite que possible. Dans l'aura résiduelle de l'explosion, le seigneur Strale regardait dans les bois et fixait des yeux le mage de guerre. - Malédiction ! jura le seigneur Eryl avant de s'enfuir. L'ambassadeur se remit sur pied et le poursuivit. - Cela a dû nécessiter une grande quantité d'énergie magique, même pour vous, cria le seigneur Strale en courant. Ne savez-vous pas qu'il ne faut jamais utiliser un sort à distance quand vous n'êtes pas certain d'atteindre votre cible ? - Jamais je n'aurais pensé que cet idiot.. Le seigneur Eryl fut frappé par derrière et projeté sur le sol humide avant d'avoir eu le temps de terminer. - Ce que vous pensiez n'a aucune importance, dit calmement le seigneur Strale en retournant le mage de guerre et en lui immobilisant les bras avec ses genoux. Je ne suis pas un mage de guerre mais je me suis assuré de ne pas gaspiller toutes mes réserves lors de votre petite embuscade. Peut-être est-ce une question de philosophie. En tant qu'agent impérial, je suis très conservateur. - Qu'allez-vous faire ? gémit le seigneur Eryl. - Gnorbooth était un homme bien, un des meilleurs, alors je vais vous faire très mal. L'ambassadeur fit un geste et sa main se mit à luire. C'est une certitude. Ce que je vous infligerai après dépendra de ce que vous me direz. J'ai envie de tout savoir sur l'ancien duc d'Oloïne. - Que voulez-vous savoir ? hurla le seigneur Eryl. - Absolument tout, répliqua le seigneur Strale avec une grande patience.
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