Le récit de Maître Zoaraym : Différence entre versions
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Version du 8 mars 2014 à 18:27
Média d'origine : TES 3 : Morrowind
Par Gi'Nanth
Le temple de la Danse des Deux Lunes, qui se dresse à Torval, est depuis de nombreux siècles le meilleur centre d'entraînement pour ceux qui combattent à mains nues. Les maîtres qui y officient enseignent à des élèves de tout âge et venus des quatre coins de l'empire les techniques les plus anciennes et leurs variantes modernes, et, il n'est pas rare que leurs disciples se fassent par la suite un nom. J'ai moi-même suivi leur programme d'instruction et je me souviens avoir demandé à mon premier maître, Zoaraym, lequel des anciens élèves avait, selon lui, le mieux retenu les leçons du temple. " Je n'étais pas un maître lorsque j'ai fait la connaissance de cet homme, mais apprenti, moi aussi, me répondit-il en souriant, ce qui le fit ressembler à un fruit desséché tant il était ridé. C'était il y a bien longtemps, avant la naissance de tes parents. Je suivais l'enseignement du temple depuis de longues années, assistant aux leçons dispensées par les plus grands maîtres de la Danse des Deux Lunes. Gi'Nanth, tu finiras par comprendre que l'entraînement du corps doit correspondre à celui de l'esprit et que les exercices que nous enseignons au temple ont été conçus dans cet ordre bien précis au fil des ans, en accord avec les préceptes du Nigme-T'har. A cette époque, j'avais atteint le plus haut niveau existant, de sorte que rares étaient ceux capables de me vaincre à mains nues, même en utilisant des moyens magiques ou surnaturels. Mais il y avait alors au temple un serviteur dunmer qui avait quelques années de plus que moi et les autres élèves de ma classe. Nous ne l'avions remarqué qu'en passant au fil des ans, car il faisait toujours son travail dans le plus grand silence et repartait sans mot dire. De toute façon, nous ne l'aurions pas écouté s'il s'était adressé à nous, accaparés que nous étions par nos leçons. Puis notre dernier maître nous dit que le temps était venu pour nous de quitter le temple ou de devenir instructeurs à notre tour. Cela fut l'occasion d'une grande fête, à laquelle le Mane vint assister en personne. Comme l'enseignement du temple était porté vers la philosophie et le combat, des affrontements furent organisés dans l'arène, non pas entre les meilleurs, comme c'était généralement le cas lors de ce type d'occasion, mais entre tous les élèves. Lors du premier jour, j'étais en train de lire la liste des participants afin de voir qui je devais affronter en premier lorsque j'entendis une conversation dans mon dos : le serviteur était venu trouver le grand prêtre pour s'entretenir avec lui. Pour la première fois de ma vie, le Dunmer parla en ma présence et j'entendis prononcer son nom. - J'ai cru comprendre que tu souhaitais nous quitter afin de prendre part à la lutte que les tiens livrent en Morrowind, Taren, disait le grand prêtre. Sache que j'en suis désolé. Tu es parmi nous depuis si longtemps... S'il est quoi que ce soit que je puisse faire pour toi, n'hésite pas à demander. - Merci de votre bonté, répondit le serviteur. J'aurais bien une requête à formuler, mais je comprendrais que vous me la refusiez. Depuis mon arrivée ici, j'ai observé la formation des élèves, m'entraînant chaque fois que j'avais du temps libre. Je sais que je ne suis qu'un humble serviteur, mais ce serait un grand honneur pour moi si vous me laissiez prendre part à la compétition. Je dus retenir un cri de stupeur en entendant ces mots. Quelle impertinence ! Penser qu'il était digne de se mesurer à nous, qui avions tant travaillé pour en arriver là ! Mais, à ma grande surprise, le grand prêtre accepta, ajoutant le nom de Taren Omathan à la liste des combattants. Je mourais d'envie d'aller raconter la nouvelle aux membres de ma classe, mais mon premier combat débutait dans quelques minutes. J'ai affronté dix-huit adversaires à tour de rôle, prenant le dessus sur chacun d'eux. La foule rassemblée dans les gradins de l'arène connaissait mon niveau, aussi chacune de mes victoires ne me valut-elle que quelques applaudissements polis. Bien que très concentré, je ne manquai de constater que d'autres compétiteurs attiraient davantage de réactions de la part du public. Les spectateurs se mettaient à murmurer et à s'en aller les uns après les autres, pour assister à quelque chose de plus spectaculaire que mes victoires attendues. L'une des plus importantes leçons que nous enseignons consiste à ne jamais se laisser aveugler par la vanité. A l'époque, je comprenais qu'il était nécessaire que le corps et l'esprit ne fassent qu'un et qu'il ne fallait en aucun cas se laisser distraire par les influences extérieures, mais je dois reconnaître que je n'avais pas accepté la leçon en mon for intérieur. Je savais que j'étais le plus fort et mon orgueil souffrit de voir les spectateurs me déserter. La finale arriva enfin, après que je me fus qualifié aisément. Mais lorsque je vis qui je devais affronter, ma mauvaise humeur de jeune homme blessé dans sa dignité se transforma en profonde incrédulité. Car mon ultime adversaire n'était autre que Taren le serviteur ! Ma première réaction fut qu'il devait s'agir d'une plaisanterie ou d'un ultime test philosophique. Puis, en observant le public, je vis que tout le monde s'attendait à un superbe combat. Nous nous saluâmes, moi avec rigidité, et lui avec élégance et modestie. L'affrontement débuta sans attendre. Persuadé que mon opposant n'était pas digne de nettoyer l'arène, et encore moins de combattre à l'intérieur, j'ai tout d'abord tenté de mettre un terme rapide au combat. Rétrospectivement, il me faut bien reconnaître que c'était totalement illogique de ma part, car Taren avait forcément dû vaincre un grand nombre d'adversaires pour arriver en finale. Il para mes attaques avec simplicité, répliquant de même. Extrêmement varié, son style mêlait feintes, attaques sans fioritures et déplacements d'une incroyable complexité. J'ai tout tenté, mais à aucun moment il n'a montré la moindre crainte ou le moindre dédain envers moi. Le combat dura longtemps. Je ne sais à quel moment j'ai compris que j'étais destiné à perdre mais, au final, ma défaite ne m'a en rien surpris. Je me suis incliné devant lui, éprouvant une soudaine modestie qui ne m'était pas habituelle. Mais alors que nous quittions l'arène sous un tonnerre d'applaudissements, je lui ai demandé comment il avait pu devenir maître en secret. - Je n'ai jamais eu la possibilité de suivre l'enseignement du temple, me répondit-il. Mais, chaque jour, je commençais par nettoyer les chambres des élèves confirmés avant de passer à celles des néophytes. De cette manière, je n'ai jamais eu l'infortune d'oublier les erreurs de débutants alors même que j'observais attentivement les leçons données par les maîtres. Taren quitta Torval le lendemain matin pour retourner dans son pays natal et je ne l'ai plus jamais revu, mais je me suis laissé dire qu'il était devenu prêtre et professeur à son tour. Moi aussi, j'ai finalement choisi cette voie, et j'enseigne autant aux enfants qu'à ceux qui cherchent juste à se perfectionner. Et je n'oublie jamais d'apprendre à mes élèves comment combattent ceux qui n'ont jamais reçu de cours, afin qu'ils ne reproduisent pas mon erreur. " |