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Telle que racontée par l'archidruide Ilyès.

Faune était la plus intelligente de toutes les créatures de la forêt. Ses sabots étaient rapides et agiles, et lui permettaient de sauter de rocher en rocher sans jamais glisser ni toucher le sol. Sa fourrure était douce et brillante. Ses cornes, délicatement tournées et symétriques. Tout cela, le Faune le savait. Mais il savait aussi combien il était intelligent. Combien il lui serait facile de convaincre les autres créatures de la forêt de lui obéir. Comment ses pensées couraient, comme l'écume sur la vague.

Un jour, pendant que Faune bondissait dans les fourrés, il marcha dans un collet, qui se resserra rapidement sur son sabot avec un craquement soudain !

Surpris, il rua de son sabot captif tandis que le piège le soulevait dans les airs, pour le laisser suspendu à bonne distance du sol.

Il se débattit et rua de ses puissantes jambes, mais la corde tint bon. Il se tourna et s'agita, mais la corde tirait à rebrousse-poil la fourrure bouclée dont Faune était si fière, et la lui arrachait. Faune, dans les airs, s'efforça de retenir ses larmes.

Serpent, le plus petit et plus discret de tous les animaux de la forêt, fut réveillé par les sanglots de Faune.<br>
« Mon cher Faune, que t'arrive-t-il ? », demanda-t-il.

Faune, qui avait ignoré que Serpent était proche, se reprit bien vite.

« Rien, cher Serpent. »

Car sa fierté ne lui permettait pas de montrer sa faiblesse à une créature qui n'avait ni fourrure ni sabots.

« Tu sembles suspendu dans le ciel.<br>
– Bien volontairement, cher Serpent. Car je mourais d'envie de faire une sieste, et ne trouvais nulle paix sur le sol.<br>
– Ta cheville est prise dans une corde.<br>
– Bien sûr, cher Serpent. Comment veux-tu sinon que je me soulève dans les airs ? Ton esprit faible ne pourrait sans doute pas comprendre un tel exploit. »

Serpent persista, une dernière fois :<br>
« Veux-tu de l'aide pour descendre ?<br>
– Pourquoi voudrais-je de ton aide ? Une créature comme toi, sans mains ni sabots ? Non, tu ne pourrais jamais m'aider, même si je le désirais.<br>
– Très bien, en ce cas, je te laisse te reposer. »

Faune regarda Serpent partir, et lutta désespérément contre son orgueil. Il ne voyait aucune autre créature dans les parages, et se sentait pris de vertige à force de garder la tête en bas. Faune parvenait à peine à réfléchir, mais il devait faire quelque chose.

« Serpent ! appela-t-il soudain.<br>
– Oui, Faune ? répondit Serpent<br>
– Si tu vois un nœud de corde au sol, et te sens pris d'une envie de le dénouer, ne te retiens pas. »

Serpent sourit avec malice, encore piqué du mépris de Faune chaque fois qu'ils s'étaient rencontrés.

« Pourquoi ferais-je une chose pareille, cher Faune ? Dénouer une corde. Je ne voudrais pas déranger ta sieste. »

Et ainsi Serpent laissa-t-il Faune, suspendu dans les hauteurs de la forêt, seul avec sa fierté qui l'avait empêché de demander de l'aide correctement.
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