Les Ruines de Kemel-Ze

De La Grande Bibliotheque de Tamriel
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Média d'origine : Morrowind
Commentaire : La version française de ce livre contient quelques erreurs par rapport à la version originale, concernant la localisation de la cité. La localisation de Seyda Nihyn a probablement changé également, entre la rédaction de ce livre et la parution du jeu. Apparaît également dans TES Online en quatre volumes, avec une traduction française différente.

Par Rolard Nordssen


Alors que les acclamations de mes collègues de la Société impériale résonnaient encore à mes oreilles, je décidai de retourner en Morrowind sans perdre de temps. Je ressentis un petit pincement au cœur en disant au revoir à la cité impériale, mais je savais que les merveilles que j'avais ramenées de Raled-Makaï n'étaient qu'un minuscule échantillon des ruines dwemers proposées par Morrowind. Des trésors plus spectaculaires encore m'attendaient, j'en avais la certitude. D'autant que j'avais encore eu l'occasion de voir le triste exemple donné par ce pauvre Bannerman, qui continuait de se faire inviter en société sur la foi de son unique expédition dans le Marais noir, plus de vingt ans auparavant. Je me jurai de ne jamais me comporter comme il le faisait.

Muni d'une lettre écrite de la main de l'impératrice, je ne doutais pas que je bénéficierais cette fois de l'aide des autorités impériales, ce qui me permettrait de ne plus avoir à redouter les assauts des autochtones superstitieux. Mais où commencer mes recherches ? Les ruines de Kemel-Ze constituaient le choix le plus évident, d'autant que m'y rendre ne poserait pas de problème, contrairement à Raled-Makaï. Egalement connu sur le nom de Ville de la Falaise, Kemel-Ze s'étend au pied de la falaise abrupte surplombant le Gouffre de Vvardenfell. Les voyageurs venus "de Seyda Nihyn" dans la version françaisede la côte est de Vvardenfell s'y rendent souvent en navire, mais il est également possible d'atteindre la ville par voie de terre, les sentiers qui la relient aux proches villages étant tout à fait praticables, bien que dangereux.

Une fois mon expédition assemblée à Seyda Nihyn (avec les complications qu'une telle entreprise implique dans une contrée semi-civilisée), nous partîmes en direction du village de Marog, situé près des ruines, où j'espérais pouvoir louer les services d'un groupe d'ouvriers qui se chargeraient des fouilles. Mon interprète était un certain Tuen Panaï, singulièrement guilleret pour un Elfe noir. Je l'avais engagé à Seyda Nihyn, sur la recommandation du commandant de la garnison locale. Il m'assura que les habitants de Marog et des environs devaient parfaitement connaître Kemel-Ze, qu'ils pillaient sans vergogne depuis plusieurs générations. Puisque j'évoque Tuen Panaï, j'en profite pour dire que son aide m'a été extrêmement précieuse et que je le recommande sans hésitation à tout collègue désirant conduire une expédition dans les contrées inexplorées de Morrowind.

C'est à Marog que nous connûmes nos premiers ennuis. Le chef du village, vieil homme réservé mais élégant, semblait tout à fait disposé à collaborer avec nous, mais le prêtre local (représentant la religion absurde qui domine dans la région et incite les gens à vénérer des êtres appelés Tribuns, qui vivraient dans des palais de Morrowind, mais que personne n'a plus vu depuis des millénaires, comme de bien entendu) s'opposa avec ferveur contre toute excavation dans les ruines. Faisant sans cesse référence aux tabous religieux, il paraissait près de recueillir le soutien des villageois quand je lui agitai la lettre de l'impératrice sous le nez en mentionnant que j'étais ami avec le commandant de la garnison de Seyda Nihyn. Il se tut aussitôt. Nul doute que ses protestations avaient été prévues de concert avec les autres villageois, afin que ceux-ci puissent réclamer un salaire plus important. Quoi qu'il en soit, une fois le prêtre parti en bougonnant (et en maudissant les diables étrangers venus mettre son autorité en cause), une ligne de villageois disposés à se faire engager se constitua aussitôt.

Pendant que mon assistant s'occupait des contrats, de l'approvisionnement et des autres détails matériels, maître Arum et moi-même partîmes pour les ruines. Par voie de terre, on les atteint par d'étroits et tortueux sentiers qui permettent de descendre la falaise, et, le moindre faux pas se solde généralement par un plongeon vertigineux dans les vagues se jetant sur les récifs, loin en dessous des pieds du téméraire voyageur. L'entrée d'origine devait se trouver au nord-est, dans le large quartier qui a sombré sous la surface des flots il y a bien longtemps, quand l'éruption du mont Ecarlate a créé cet immense cratère. Après avoir négocié le sentier traître avec succès, nous débouchâmes dans une vaste salle à ciel ouvert de notre côté et dont l'autre extrémité se fondait sans l'obscurité. A chaque pas, nous marchions sur des morceaux de métal tordu, aussi communs dans les ruines des Nains que les bouts de poterie le sont ailleurs. C'était manifestement à cet endroit que les pillards remontaient ce qu'ils avaient trouvé dans les niveaux inférieurs afin d'effectuer leur tri. Ils ne conservaient que les pièces qu'ils recherchaient, c'est-à-dire, bien souvent, les plaques de métal protégeant les délicats mécanismes nains, les rouages de ces derniers finissant abandonnés sur place car ils n'intéressaient personne. Je ris par-devers moi en pensant aux nombreux guerriers de Tamriel dont l'armure était vraisemblablement constituée, sans qu'ils le sachent, de carcasses de mécanismes nains. Car telle est la nature de ce que l'on appelle communément et, à tort, " armure de Nain " : la carapace métallique des hommes mécaniques d'antan. Mais mon hilarité me quitta quand je réalisai la valeur que pourrait avoir un tel mécanisme encore intact. Vraisemblablement, ce lieu regorgeait d'inventions naines, à en juger par les débris jonchant le sol de la vaste salle. Le seul problème était qu'il ne devait plus guère en subsister en bon état après plusieurs siècles de pillages incessants. Comme je l'ai écrit plus haut, les seules plaques métalliques valent déjà une fortune pour qui sait les vendre comme armure (les armures naines sont toujours constituées de parties d'inventions, ce qui les rend généralement lourdes et peu pratiques à porter). Mais une armure provenant d'un mécanisme intact vaut plus que son poids en or, car ses pièces s'intègrent si bien les unes aux autres que celui qui les porte remarque à peine leur poids. Je n'avais bien évidemment pas l'intention de vendre mes découvertes, fussent-elles de grande valeur. Mieux valait les ramener à la Société impériale afin qu'elles soient étudiées scientifiquement. J'imaginais déjà les cris de surprise de mes collègues quand je leur dévoilerais ces merveilles lors de ma prochaine conférence et je me pris de nouveau à sourire.

Je ramassai un morceau de métal gisant à mes pieds. Il luisait toujours, les alliages des Nains ayant la propriété de résister à la corrosion et au passage du temps. Je me demandai quels secrets m'attendaient encore dans les passages qui s'offraient à moi, en dépit de tous les pillards qui s'étaient succédé en ce lieu, et surtout, quels mystères attendaient d'être ramenés enfin à la lumière du jour, qu'ils n'avaient plus vue depuis si longtemps. Oui, moi ! Il ne me restait plus qu'à les trouver. Faisant signe à maître Arum de me suivre, je m'enfonçai impatiemment dans l'obscurité.

Maître Arum, Tuen Panaï et moi-même passâmes plusieurs jours à explorer les ruines tandis que mes assistants installaient notre camp au pied de la falaise et amenaient tout notre équipement depuis le village. Je cherchais un endroit prometteur où débuter les excavations, une salle ou un couloir bloqué par un éboulement et pouvant conduire à une partie des ruines que les pillards n'avaient pas encore découverte.

Nous en trouvâmes deux très rapidement, pour nous apercevoir que des passages tortueux permettaient de contourner les obstacles et d'atteindre les pièces suivantes. Mais bien que tout ait été volé dans ces premières salles, elles n'en demeuraient pas moins fort dignes d'intérêt pour un archéologue professionnel. Derrière une porte en bronze massive décrochée de ses gonds par une violente secousse sismique, nous découvrîmes ainsi une vaste pièce emplie de splendides fresques murales qui impressionnèrent même Tuen Panaï, lequel se disait pourtant blasé après avoir, selon ses dires, " exploré toutes les ruines naines de Morrowind ". Elles semblaient représenter une ancienne cérémonie religieuse, au cours de laquelle des Nains à longue barbe blanche avançaient le long des murs en s'inclinant devant la forme massive d'un dieu gravé à la surface du mur du fond, dieu immobilisé alors qu'il quittait un cratère pour poser le pied sur un nuage de fumée ou de vapeur. Selon maître Arum, il n'existe pas d'autres représentations connues des rites nains, aussi cette découverte nous procura-t-elle une vive excitation. Je chargeai une équipe d'ouvriers de détacher les panneaux muraux, mais leurs outils se révélèrent incapables d'entamer la surface de la roche. En examinant cette dernière plus en détail, nous nous rendîmes compte que tous les murs de la salle étaient recouverts d'un métal ayant la texture et l'aspect de la pierre et que nos outils ne pourraient ébrécher. Je songeai quelques instants demander à maître Arum de faire usage de magie, mais le risque de détruire la fresque était trop grand. Malgré mon désir de ramener cette splendeur intacte à la cité impériale, je me contentai de demander à mes ouvriers de se livrer à une reproduction par frottage des divers sujets représentés. Si la Société était suffisamment intéressée par cette oeuvre, nul doute qu'il serait possible de louer les services d'un spécialiste ou d'un maître-alchimiste qui trouverait le moyen de détacher la couche supérieure des parois sans les endommager.

Je découvris une autre salle digne d'intérêt au sommet d'un grand escalier en colimaçon, difficilement négociable en raison de l'éboulement d'une partie du plafond. La pièce au plafond en forme de dôme contenait en son centre un mécanisme imposant mais détruit. Des constellations peintes étaient encore visibles par endroits à la surface du dôme. Maître Arum et moi tombèrent d'accord pour dire qu'il devait s'agir d'une sorte "de laboratoire" dans la version françaised'observatoire, ce qui signifiait que le mécanisme était sans doute autrefois un télescope. Il ne serait possible de l'extraire par l'escalier qu'en le démontant totalement (c'est d'ailleurs pour cette raison que les pillards ne s'y étaient pas intéressés), aussi décidai-je de le laisser tel quel pour le moment. L'existence de cet observatoire nous révéla que cette pièce devait autrefois se trouver à la surface et un examen plus poussé nous apprit que nous nous trouvions dans ce qui était à l'origine un bâtiment, et non dans une caverne souterraine. Les autres passages étaient tous bloqués. En mesurant avec précision la distance verticale qui séparait le sommet de la falaise de l'observatoire, nous vîmes qu'il se trouvait désormais à plus de 75 mètres sous la surface du sol, preuve, si besoin était, de la violence avec laquelle la fureur du mont Ecarlate s'était manifestée.

Cette découverte nous encouragea à descendre plus bas encore. Comme nous savions désormais approximativement où se trouvaient les bâtiments autrefois émergés, nous pouvions nous désintéresser de la plupart des passages supérieurs, conscients que nous étions qu'ils conduiraient vraisemblablement à " l'extérieur ". Nous ne perdîmes donc pas de temps à les dégager. Une large galerie flanquée de colonnes gravées attira tout particulièrement mon attention. Elle s'achevait par un gigantesque éboulis, que les pillards avaient manifestement essayé de contourner en creusant un tunnel latéral qu'ils avaient finalement abandonné. Mais avec nos ouvriers et la magie de maître Arum, j'étais persuadé que nous pourrions réussir là où nos prédécesseurs avaient échoué. Je chargeai donc mon équipe d'Elfes noirs de commencer les excavations, soulagé de voir que la véritable exploration de Kemel-Ze s'engageait enfin. Si tout se déroulait comme je le souhaitais, mes pieds fouleraient bientôt un sol où personne n'avait marché depuis l'aube des temps.

J'étais si excité à cette idée que je poussai sans doute un peu trop mes ouvriers. Tuen Panaï m'apprit qu'ils commençaient à se plaindre des journées de travail trop longues et que certains pensaient à s'en aller. Sachant d'expérience que rien ne motive plus les Elfes noirs que quelques coups de fouet, je fis flageller les agitateurs tout en confinant les autres sur site tant qu'ils n'auraient pas dégagé le passage. Le texte original use ici d'une expression louant StendarrHeureusement que j'avais pensé à réquisitionner quelques légionnaires à Seyda Nihyn ! Les ouvriers se montrèrent tout d'abord bougons, mais ils retrouvèrent vite leur entrain après que je leur eus promis une prime d'une journée de paye une fois franchi l'obstacle. Les mesures prises pour mater ce début de rébellion pourront sembler dures à mes lecteurs habitués aux conforts de la civilisation, mais je vous assure qu'il n'existe pas d'autre moyen de s'assurer que ces individus continuent de faire leur travail.

L'éboulement était bien plus important que je ne le pensais, à tel point qu'il nous fallut près de deux semaines pour déblayer le passage. Les ouvriers étaient aussi excités que moi quand leurs pioches vinrent enfin à bout de la montagne de débris qui nous empêchait de progresser et nous partageâmes une bouteille d'alcool local (une infâme mixture, à dire vrai !) pour montrer que notre différend était bel et bien oublié. Je ne me tenais plus d'impatience alors qu'ils élargissaient le trou pour permettre de passer dans la salle que nous apercevions au-delà. Ce passage nous conduirait-il à une série de niveaux inexplorés et emplis d'artefacts abandonnés par les Nains disparus ou bien se terminerait-il en cul-de-sac quelques mètres plus loin ? Enfin, je pus me faufiler par le passage et, une fois de l'autre côté, j'attendis quelques instants dans le noir. L'écho et les pierres que je sentais sous mes pieds m'apprirent que je me trouvais dans une grande pièce. Me levant précautionneusement, je relevai le capuchon de ma lanterne. Alors que la lumière baignait la salle, je regardai autour de moi, hébété. Jamais, dans mes rêves les plus fous, je n'aurais pu imaginer tant de merveilles !

Partout brillaient les alliages nains. Je venais de découvrir une partie de la cité engloutie à laquelle les pillards n'avaient jamais accédé ! Le cœur battant la chamade, j'inspectai les environs. La salle était immense et le plafond s'élevait bien au-delà du cercle de lumière projeté par ma lanterne. De la même manière, son extrémité se perdait dans une ombre relevée par quelques lueurs annonçant des trésors encore dissimulés. Deux rangées d'hommes mécaniques étaient disposées le long des murs, tous intacts à un détail près : leur tête avait été ôté de manière rituelle puis posée à leurs pieds. Cela ne pouvait signifier qu'une seule et unique chose : je venais de pénétrer dans le tombeau d'un grand noble Nain, voire d'un roi ! Ce type de sépulture était déjà connu, principalement grâce à l'expédition menée par Ransom en Martelfell, mais jamais aucune tombe intacte n'avait été découverte jusqu'à présent.

Mais s'il s'agissait vraiment d'un tombeau, où la dépouille se trouvait-elle ? J'avançai lentement, ayant l'impression que les têtes désincarnées posées au sol me surveillaient comme elles le faisaient depuis une éternité. J'avais entendu de nombreux récits faisant état de la malédiction des Nains, mais je les avais chassés de mon esprit, persuadé qu'il s'agissait de simples superstitions. Pourtant, un frisson de crainte remonta le long de mon échine tandis que je progressais dans cette salle, déserte depuis le cataclysme qui avait détruit la cité. Je percevais clairement une présence maléfique qui m'en voulait d'avoir pénétré en ce lieu. Je m'arrêtai un instant pour mieux tendre l'oreille. Rien.

Sauf, peut-être... au bout de quelques secondes, il me sembla entendre un sifflement régulier, comme si quelqu'un respirait non loin de moi. Je dus luter contre la panique soudaine qui enfla en moi. J'étais venu sans arme, trop excité à l'idée d'explorer ce passage inconnu pour penser aux périls éventuels que pourrait receler une telle entreprise. Le visage ruisselant de sueur, je scrutai les ténèbres en quête du moindre mouvement. Ce faisant, je m'aperçus brusquement que la salle était chaude, bien plus que le reste des souterrains que nous avions exploré jusque-là. Mon enthousiasme revint en force. Se pouvait-il que j'ai découvert un bâtiment qui soit encore relié au système de chauffage à vapeur de la cité ? En effet, nous avions vu presque partout des tuyaux froids courant le long des murs. En avisant un près de moi, je posai la main dessus... pour la retirer précipitamment : il était brûlant ! Observant plus attentivement la série de canalisations, je vis que certaines avaient succombé à la corrosion et que des jets de vapeur s'échappaient des trous ainsi causés. Voilà la source de la " respiration " que j'avais entendue ! Soulagé, je ris de ma propre stupidité.

Désormais rassuré, je me rendis rapidement au fond de la pièce, saluant au passage les rangs de soldats mécaniques qui m'étaient apparus si menaçants quelques instants auparavant. Je me permis un sourire de triomphe lorsque la lumière de ma lanterne chassa la nuit des siècles pour me révéler l'effigie géante d'un roi nain debout sur une estrade, sceptre en main. Quel fabuleux trésor ! Je fis lentement le tour de l'estrade, admirant le travail des Nains. Haut de six mètres, le roi d'or se tenait sous une merveille architecturale de coupole, qui ne nécessitait aucun pilier et paraissait flotter loin au-dessus de moi. Sa longue barbe paraissait vivante tant son rendu était fidèle et ses yeux luisants semblaient suivre le moindre de mes mouvements. Mais mes craintes s'étaient envolées et je le contemplai sans crainte. Mon roi, comme je pensais déjà à lui. Je montai sur l'estrade pour inspecter l'armure sculptée de plus près. Soudain, les yeux de la statue s'ouvrirent et son poing se leva pour s'abattre sur mon crâne !

Je me jetai de côté et le bras d'or retomba brusquement, heurtant les marches de l'estrade dans une pluie d'étincelles. Dans un sifflement de vapeur et un grincement de rouages, le colosse avança vers moi à une allure terrifiante, sans me quitter un seul instant du regard. Je fuis précipitamment, m'abritant derrière un pilier afin d'échapper à un nouveau coup de poing. J'avais lâché ma lanterne sans m'en rendre compte et je me repliai loin du halo de lumière qu'elle diffusait encore, espérant pouvoir rejoindre les mécaniques sans tête et, de là, l'entrée du passage. Mais où mon monstrueux poursuivant était-il passé ? On aurait pu penser qu'une statue en or de six mètres de haut était extrêmement visible, et pourtant je ne la voyais nulle part. La lampe mourante n'éclairait qu'une faible partie de la pièce. Il pouvait se cacher n'importe où. Soudain, la rangée de soldats métalliques qui se trouvaient devant moi volèrent en tous sens : le gardien colossal était là, qui me barrait le chemin de la sortie ! Je repartis en arrière tandis que l'implacable machine fouettait l'air de ses bras pour me forcer à me replier dans le coin de la pièce. Finalement, je me retrouvai acculé. Je le fixai droit dans les yeux, déterminé à mourir en homme. Le poing se leva pour porter son coup de grâce.

Une vive lumière envahit alors la pièce. Plusieurs décharges d'énergie violette s'enroulèrent autour de la carapace dorée de la statue, qui se retourna pour faire face à cette nouvelle menace. Maître Arum était venu à la rescousse ! J'allais pousser un cri de joie lorsque je vis que le colosse s'intéressait de nouveau à moi. La foudre ne lui avait rien fait ! " La vapeur ! La vapeur ! " hurlai-je, alors qu'il levait de nouveau le bras pour me réduire en bouillie. Un puissant sifflement fut aussitôt suivi par une vague de froid intense et je levai les yeux : le monstre était désormais recouvert d'une épaisse gangue de glace qui l'immobilisait totalement. Maître Arum avait compris. Soulagé, je m'adossai au mur, les jambes molles.

La glace craqua brusquement, tombant par plaques sur le sol, et les yeux du gardien se remirent à me chercher. Par les dieux, était-il donc impossible de l'arrêter ? Mais, à ce moment, la lueur brillant dans son regard s'éteignit et ses bras retombèrent à ses côtés. Le froid avait réussi à le mettre hors service en refroidissant la vapeur qui lui donnait vie.

Alors que maître Arum et les ouvriers se massaient autour de moi pour me féliciter d'être toujours en vie, je me mis à penser à l'avenir. Imaginant mon retour à la cité impériale, je compris que mon heure de gloire était arrivée. Mais comment pourrais-je un jour faire mieux ? Peut-être était-il temps de changer d'objectif. Si je pouvais retrouver le légendaire Oeil d'Argonie... Je me fendis d'un large sourire, et tout en savourant pleinement ma gloire actuelle, commençai à planifier ma prochaine aventure.