Le Roi Edward, 8e Partie

De La Grande Bibliotheque de Tamriel
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Chapitre 8 : Wilderland


Le voyage à travers Valenwood était agréable. Le temps restait la plupart du temps le même, avec des journées ensoleillées et des nuits froides. Des feuilles écarlates, pourpres, dorées et vertes glissaient jusqu'au sol pour former un tapis sous les sabots de leurs chevaux. Val-Boisé était vraiment différent des étroites et sombres forêts de Hauteroche. Quand ils s'approchèrent de la frontière Nord, Edward, en regardant en arrière, vit que les arbres étaient pour la plupart à nu, dépouillés de leur gloire. Devant eux s'étendaient de vastes terres vertes aux nombreuses collines, dotées de seulement quelques bosquets d'arbres. Elles semblaient se déployer indéfiniment.

"Voici Wilderland, Edward." dit Moraelyn. "Sois sur tes gardes. Elle a l'air d'un endroit agréable, mais elle n'est soumise à aucune loi. Ici, c'est chacun pour soi, et il y a bien pire que des humains. Toutes les races de Tamriel se retrouvent ici, et s'affrontent, sauf peut-être la tienne."

"Ils voyagèrent pendant quelques jours sans rien subir d'autre que des incidents mineurs, mis à part la fois où une bande de pillards Khajiits s'était glissée dans leur camp pendant la nuit. Ils furent aisément repoussés. Silk en tua un et le reste s'enfuit en hurlant. Willow, la douce elfe des bois, leur lança des boules de feu. Il n'y avait pas de route, seulement de petits chemins qui s'entrecroisaient en sinuant et semblaient ne mener nulle part.

Après deux semaines de chevauchée ils arrivèrent à une sorte de cuvette entre les collines, où la terre avait été labourée. Les grains avaient l'air mûrs et prêts à être récoltés, mais les gens étaient abbatus, dépenaillés et inamicaux. Les questions concernant les auberges ne recevaient pour toute réponse qu'haussements d'épaules et regards perplexes. Parfois, des bandes armées les défiaient et cherchaient à savoir ce qu'ils venaient faire par ici. Quand Moraelyn leur disait qu'ils allaient en Morrowind, on leur répondait de passer en vitesse et on veillait à ce qu'ils ne volent rien.

"Tout ce que nous voulons, c'est passer." dit tranquillement Moraelyn.

"Quelqu'un devrait leur apprendre les bonnes manières." grogna Mats, d'habitude placide.

"Tu peux rester et ouvrir une école de courtoisie, s'il n'y a que cela pour te faire plaisir." dit Moraelyn. "Je crains que ma vie soit trop courte pour enseigner à ces bandits les leçons dont ils auraient besoin. De plus, je n'aime pas la couleur du ciel. Il a l'air encore pire que les habitants. Je pense que nous allons tenter notre chance en ville."

La ville était entourée d'une palissade de bois et était fermée par une porte solide. Des gardes les passèrent en revue et leur en interdirent l'entrée. "Seuls les humains peuvent entrer, elfe. Prends ta racaille et fiche le camp."

"Je vois. Ali, Mats, Edward, vous semblez avoir le droit de bénéficier de l'hospitalité d'ici." Le reste d'entre nous trouvera refuge ailleurs."

Aliera affirma que même s'ils étaient tous balayés jusqu'à Primeterre par la tempête, elle ne passerait pas ces portes. Aussi contournèrent-ils la ville, passant à côté d'une douve entourant des murs de pierre encerclant un genre de donjon. Un sentier allant vers le Nord les mena jusqu'à une petite maison avec une grande grange à proximité. Les deux semblaient en piteux état, mais Moraelyn envoya Aliera et Edward frapper à la porte et demander s'ils pouvaient dormir dans la grange. Les autres attendirent sur la route.

Une femme âgée leur ouvrit, elle avait l'air heureuse de les voir. "Si vous pouvez rester ? Oui, je serait enchantée d'avoir un peu de compagnie. Mais pas la peine de dormir dans la grange, madame. J'ai une chambre d'amis. Je m'appelle Ora Engelsdottir." Aliera fit un geste vers ses compagnons qui attendaient. La femme loucha sur eux. "Ton homme est là avec quelque amis ? Oh, on se serrera un peu, alors. On sera plus au chaud. J'ai mis une marmite de soupe sur le feu ; je l'avais préparée pour qu'elle me dure toute la semaine, mais vous pouvez en prendre. Je peux en faire davantage."

"Mon mari est un elfe."

"Vraiment ? Il a l'air de bien prendre soin de toi et de ton fils. Vous êtes aussi gras que des cochons. Fais-les donc entrer. J'aimerais que ma petite-fille trouve quelqu'un comme lui pour prendre soin d'elle."

Ora refusa d'être payée, disant qu'elle n'en était pas encore au point de faire payer ses invités. Elle ajouta que des histoires, des chants et une soirée joyeuse seraient largement suffisants. Des pots et des plats étaient disposés pour pallier au plus gros des fuites d'eau. Ils se rassemblèrent autour de l'âtre et comblèrent leur hôtesse tandis que dehors, la tempête faisait rage, frappant portes et volets et menaçant d'emporter le toit.

"Dis-moi, ma dame," murmura Ora à l'oreille d'Aliera. "Il est vraiment fait pour toi ? Il est si grand et si noir."

"Tout à fait." répondit Aliera, l'air sérieux mais les yeux rieurs.

"Ah, c'est bien, alors. Il m'a un peu rappelé notre baron, qui est grand et noir...oh, pas aussi sombre que ton elfe. Il a pris ma petite-fille, Caron, et il ne la traite pas bien. Il... il la bat, ma dame. Et elle n'ose pas s'enfuir. Où irions-nous ?" Des larmes emplirent les yeux d'Ora et suivirent la courbe familière de ses joues.

Quand leur hôtesse alla dormir dans sa propre chambre, Aliera répéta ce quelle lui avait raconté.

"Allons sauver la fille." dit Beech, "Dans l'inaction, on s'empâte."

"Oui !" dirent Silk et Willow à la volée.

Mats grogna son accord. Mith et Ssa'ass semblaient intéressés.

Moraelyn avait l'air incertain. "Nous ne pouvons pas redresser tout ce qui va de travers à Tamriel. Ce baron offre un refuge à son peuple. S'ils préfèrent partir, qu'ils le fassent."

"Oui," dit Mith. "Mais s'il les protège des bandits, c'est pour pouvoir les détrousser à loisir."

"Et nous devrions le renverser ? Un autre prendra sa place. Ou alors des étrangers rentreront et il ne restera plus rien."

"Rien serait mieux que ce sale quelque chose." déclara Mats.

"Exactement." La tempête semblait s'être calmée. Aliera se dirigea vers la porte et regarda le ciel où des nuages passaient devant la lune Est. Une unique étoile bleue étincelait près de la Lune. "Zenithar est proche de Tamriel, ce soir. Moraelyn ?"

"Je pensais réparer son toit demain, s'il faisait beau." dit-il alors qu'elle revenait près du feu. "Nous ferons au moins cela. Et pour le reste, Aliera ?"

"Elle a demandé mon aide, quelque part et je... Je pense entendre la voix de Zenithar dans le vent et sentir sa main dans la pluie de cette nuit."

"Alors c'est ta quête, femme."

Aliera acquiesça de la tête, sans sourire. Elle se lova dans un coin proche de la cheminée avec Moraelyn et ils murmurèrent et rièrent ensemble pendant un certain temps. Edward s'endormit. Le lendemain matin, il fut envoyé sur le toit pour aider Beech et Willow à installer de nouveaux bardeaux. Moraelyn écrivit une lettre qu'il confia à Mats, lui demandant de l'apporter au baron, de se rendre au château environ à l'heure du dîner et d'y aller à pied.

"Vous allez le défier pour la fille!" sourit Edward "Mais combattra-t-il ? Et ne sera-t-il pas de nouveau sur son dos une fois que nous serons partis ?"

"Hmm. Vu qu'il n'a pas voulu me laisser entrer dans sa ville, ta mère pensait plutôt l'inviter chez nous." Moraelyn cacheta la lettre en apposant son sceau grâce à sa bague et la remit à Mats.

"Oh. La route est encore longue jusqu'à chez vous, n'est-ce pas ?" Edward se sentait un peu déçu que le sauvetage n'ait pas lieu immédiatement, mais il supposait que s'attendre à ce que huit personnes prennent un donjon n'était pas raisonnable, même s'il s'agissait des Compagnons de Moraelyn. Les chants exagéraient probablement leurs exploits.

Moraelyn sourit, ébouriffa les cheveux d'Edward et lui dit de mettre fin à ses questions, se leva sur le toit, et regarda sa mère. Moraelyn et Mats partirent ensemble à pied. Aliera dit qu'ils étaient partis chasser. Que même à l'heure du dîner, ils ne seraient pas de retour. Aliera conseilla à Edward de ne pas s'inquiéter, ils se retrouveraient plus tard.

Le soleil s'était couché depuis longtemps quand ils firent leurs adieux à leur hôtesse. Ils prirent tous les chevaux avec eux et les laissèrent dans un bosquet près du mur Nord du donjon. Aliera demanda à Edward s'il voulait les attendre avec les chevaux. Edward lui demanda où ils allaient.

"Nous devons pénétrer dans le donjon pour récupérer la petite fille d'Ora. Ne pose pas de question, Edward. Si tu viens, reste avec moi et fais exactement ce que je te dis de faire. Lévite au-dessus des douves : je dois nager. Une fois que nous les aurons traversées, nous escaladerons le mur. Une fois à l'intérieur, contente-toi de me suivre en restant aussi silencieux que possible."

Edward resta bouche bée devant sa mère et ses compagnons. Comment six d'entre eux pourraient-ils prendre d'assaut un donjon ? Trois femmes, deux hommes et un garçon ? Il y aurait des gardes sur les murs et plus encore à l'intérieur. Il supposait que Mats serait à l'intérieur. Mais où étaient Moraelyn et Mith ?

Il y avait des choses terribles dans le fossé. Edward commença par protester, puis il changea d'avis. Ssa's se glissa dans la douve le premier. Il y eut quelques éclaboussures et sifflements, puis l'eau redevint calme. Aliera entra dans l'eau. Les autres lévitèrent.

"Voici les cordes." dit Beech, tâtonnant long du mur. Il y avait trois cordes. Edward, Beech et Ssa'ass montèrent les premiers; Aliera, Willow et Silk les suivirent. Mith et Moraelyn attendaient au-dessus. Deux gardes affalés ronflaient doucement.

"Comment..." commença Edward, et se retrouva avec la main de sa mère plaquée sur sa bouche. Un garde d'une autre section du mur lança un appel et le coeur d'Edward cessa de battre. Mith lui répondit quelque chose et le bruit de pas s'éloigna.

Les compagnons rejoignirent les escaliers silencieusement et se glissèrent dans la cour comme des ombres. Aucun garde ne surveillait la porte. A l'intérieur, les couloirs étaient étrangement calmes. Ils s'arrêtèrent à une porte imposante et se tapirent contre le mur qui la côtoyait. Ils pouvaient entendre des voix venant de l'intérieur. Un faible et effrayant gémissement retentit et mourrut aussitôt. Moraelyn siffla quelques notes d'une chanson dans le silence qui suivit. La porte s'ouvrit violemment et ils coururent à l'intérieur, tombant sur les gardes comme des furies.

Edward fut le dernier à rentrer, Croc en main ; il poignarda le garde le plus proche, et Beech l'acheva d'un coup sur le crâne. Mats était à l'intérieur, c'est lui qui avait ouvert la porte. Sa hache fendit la tête d'un garde, puis s'abbatit sur la porte menant à l'intérieur. Aliera et Willow avaient barré la porte extérieure. L'adversaire de Moraelyn était un homme très jeune. Il avait regardé le grand elfe noir, lâché son épée et était tombé à genoux, implorant sa pitié.

Moraelyn le regarda avec dégoût et dit "Salue Zenithar de ma part ; dis-lui que Moraelyn de Coeurébène lui demande sa clémence à ton égard. Je n'ai rien à faire de quelqu'un comme toi." Il égorgea le jeune garde. L'armure de cuir de Moraelyn fut aspergée de sang. Sa victime s'écroula en gargouillant horriblement. De l'acide brûlant envahit la gorge d'Edward ; il avala sa salive avec difficulté et détourna les yeux.

Les gardes à l'intérieur de l'antichambre étaient morts, mais à l'extérieur, des cris fusaient et des pas tonnaient et on martelait la porte. Edward suivit sa mère dans la chambre, qui était vide mis à part une fille nue attachée les bras écartés sur un énorme lit, les yeux exorbités.

Les Compagnons coupèrent ses liens, tandis qu'Aliera l'attrapa par les épaules. "C'est ta grand-mère qui nous envoie, mon enfant. Où est le baron ?"

La jeune fille désigna une bibliothèque, puis s'accrocha à Aliera. Elle n'était pas plus grande qu'Edward et ne semblait pas plus âgée. Ses seins commençaient à peine à pousser. Elle était couverte de sang et de contusions violettes et jaunes. Aliera jeta son manteau à la jeune fille. Beech l'aida à se relever. Les doigts de Mith sondaient la bibliothèque ; il y eut un déclic et une étagère glissa sur le côté. Il passa prudemment à travers l'ouverture. Les autres le suivirent et le passage secret se referma sur eux.

"Je crois que c'est juste une cache secrète."dit Mith. "Mais il y aura des pièges, sans aucun doute."

"Alors avançons prudemment, les amis." fit Aliera. "Il n'y a pas à se dépêcher. Je pense que le baron a l'intention de montrer la porte à ses invités sur le départ, comme tout bon hôte qui se respecte."

Un étroit passage s'ouvrit sur la gauche. Mith dirigea un peu de lumière dans sa direction. Le sol était recouvert d'os. Des os humains. De petits crânes sans yeux les fixaient. "Je serai ravi de le tuer." dit Moraelyn.

"Non !" protesta Aliera. "C'est ma quête, il est à moi !"

Moraelyn se tourna vers elle. "Aliera..."

"Je veux qu'on chante qu'il est mort de ma main ! Je réclame mon droit de le combattre, roi."

"Laissez-moi l'affronter et nous chanterons vos louanges ! Il fait deux fois votre taille. Vous voulez vous battre avec moi pour ce droit ?" L'elfe se pencha vers elle, plus grand qu'elle d'une bonne tête.

"Si je le dois." Aliera le frôla en passant, le bouclier au bras, et tirant une épée courte pendant sa course. Moraelyn tenta de l'attraper, la manqua et lui courut après. Sa taille le désavantageait dans l'étroit et bas passage. Des étincelles jaillissaient de son sort de bouclier alors qu'il suivait de près imprudemment les murs.

"Allez, venez, vous deux." cria Mith. "Je ne promets pas de vous en laisser."

"Moraelyn" haleta Edward, lui courant après, "Vous n'allez pas la laisser faire !"

"La laisser faire ! Et comment pourrais-je l'arrêter ? Je suis ouvert à toute suggestion, excepté de la combattre vraiment moi-même." Il semblait mi-fâché, mi-amusé.

"P-peut-être est-il parti, maintenant."

"Non, il est enfermé ici avec nous ; tout à l'heure, nous avons trouvé la sortie de l'autre côté et Mith y a posé un verrou que le baron ne retirera pas."

"Et bien paralysez-la. Vous pouvez la paralyser."

"Elle a activé son bouclier, il reflète les sorts, entre autres choses. Je n'ai pas envie de me paralyser moi-même et je serais difficile à transporter. Elle se débrouillera bien. C'est un excellent bouclier. C'est l'ric qui l'a conçu."

"Vous avez un peu de mal avec vos serrures, ce soir, baron ?" La voix de Mith venait clairement de devant eux. Ils émergèrent dans un large espace où le baron s'escrimait vainement sur la poignée d'une porte massive. "Du travail de mauvaise qualité. Vous devriez engager un autre forgeron."

"Il n'en n'aura pas besoin." gronda Aliera. Les Compagnons formèrent un demi-cercle autour d'elle. Le baron s'adossa à la porte et adopta une position de combat. C'était un homme grand, aussi grand que Mats, et il tenait une hache aussi grande que celle dont ce dernier se servait, et portait un plastron et un heaume. Il s'adressa à Moraelyn.

"Neuf contre un. Je devais m'attendre à une lâcheté de ce genre de votre part, démons noirs," Moraelyn était à l'arrière du groupe, mais le baron l'avait identifié comme chef de groupe. Certains le font, parfois.

"Vous préférez l'avantage du poids, n'est-ce pas ? Mais ma femme vous veut pour elle seule. Elle ne peut résister à votre charme, on dirait. Moi non plus ; je ne pouvais attendre que vous répondiez à mon invitation, aussi suis-je plutôt venu à vous."

"Je la bats et le reste d'entre vous me tue ? Hah ! ça n'en vaut pas la peine." ajouta-t-il, fixant Aliera de ses yeux sombres et froids.

Aliera sourit d'un terrible sourire. Ses cheveux bruns ondulaient librement sur ses épaules et elle semblait rougeoyer. "Cette femme, vous ne la vaincrez pas, baron, mais si vous y parvenez, alors vous serez libre. Vous êtes à moi et à moi seule, ce soir. J'en fais le serment, par Zenithar ! S'il parvient à me tuer, mon fantôme le hantera jusqu'à sa mort et au-delà." Cette perspective semblait la réjouir. Edward commença à trembler..

"Pour Zénithar !"

Le baron en riant. "Je ne vous crois pas, mais j'ajouterai une dernière femme à ma collection, alors. Etes-vous si fatigué de la supporter, elfe ?"

"Avez-vous tellement peur d'elle que vous préférez me faire face ?" Quelque part au fond de son esprit Edward se rendit compte que l'elfe avait raison. Malgré la bravade du baron, il avait peur d'Aliera. Edward n'avait pas prêté serment avec les autres. Il serra fortement son bâton mais ses pieds semblaient s'être enracinés au plancher.

Le baron rit encore et abattit un puissant coup vers Aliera en guise de réponse, mais elle le para sans difficulté avec son bouclier. Ses yeux s'élargirent quand il réalisa qu'elle était protégée par un bouclier magique. Aliera lui tourna autour et le toucha au bras. Elle était agile, mais il parvint à placer de nombreux coups. Si son bouclier se brisait... Edward n'alla pas au bout de sa pensée.

Mais il continuait d'espérer briser son bouclier et elle lui portait des coups sur les membres. Elle frappait vers le bas, essayant de lui ôter l'usage de ses jambes et de le vider de son sang. Ce faisant elle se moquait sa virilité, disant qu'elle le castrerait avant qu'il meure. Un grand coup la frappa dans le dos : son bouclier s'illumina et disparut.

Le baron leva sa hache pour lui fendre le haut du crâne d'un seul coup. Elle recula le bras et planta sa mince épée courte droit dans l'oeil de son ennemi. Il lâcha la hache et tomba à genoux en hurlant, ses mains griffant son visage. Aliera recula et enfonça l'épée davantage, la fichant profondément dans le cerveau. Le corps s'affaissa, tressautant et sursautant.

"Bien combattu, femme !"

"J'ai eu un bon professeur, et un armurier encore meilleur !" rit Aliera, puis elle rejeta sa tête en arrière et poussa un hurlement de triomphe, bras levés, poings serrés.

"C'est grâce à toi !" Moraelyn saisit Silk dans une rude étreinte et l'embrassa bruyamment. "C'est un truc ingénieux que tu lui as appris, Silk."

"Je vous serais grée de cesser de flirter avec mon entraîneur, mari !" dit Aliera, rangainant soigneusement sa mince lame d'adamantium.

"Moi, flirter ? Pas alors que ton sang a coulé et que tu portes encore ton bouclier. Je l'ai juste remerciée. J'embrasserai I'ric aussi la prochaine fois que je le verrai."

"Est-il vraiment mort ?" Caron s'était accrochée à Beech pendant tout le combat, les yeux fermés. Maintenant, elle considérait Aliera avec révérence, Edward pensa que c'était le bon mot. Edward ressentait quelque chose de similaire, même si cela ressemblait davantage à de l'horreur.

"Exactement." dit Aliera, regardant avec satisfaction la forme qui tressautait encore. La jeune fille s'approcha davantage, puis s'agenouilla à son côté. Elle prit une pierre et le frappa au visage avec, encore et encore, sanglottant. Quand elle eut fini, Ssa'ass lui lança quelques sorts de guérison. Mith déverouilla la porte. Il ressortirent tout près de l'endroit où ils avaient laissé les chevaux.

Ils ramenèrent la fille chez elle et ils l'y laissèrent, lui demandant de raconter à quiconque tenterait de s'en prendre à elle que les servants de Zenithar reviendraient si elle était blessée. La vieille femme abasourdie étreignit sa petite-fille. Quand ils firent leurs adieux, elle murmura à Aliera de bien prendre soin de son homme.

"Oh, je n'y manquerai pas", répondit Aliera, "Je n'y manquerai pas."

  • * * * * * * *



Quand ils s'arrêtèrent pour se reposer, Aliera vint vers Edward pour lui parler mais il répliqua qu'il était très fatigué et qu'il voulait juste dormir. Moraelyn l'attira à l'écart, disant que si son fils n'avait pas besoin d'elle, elle pouvait venir voir son mari, qui lui en avait besoin. Ils s'écartèrent de la lumière du feu. Edward resta éveillé, entendant leurs petits bruits étouffés. Cela n'était pas inhabituel. ça l'avait d'abord troublé "Je ne peux pas dormir, vous êtes trop bruyants." avait-il dit, une nuit. "Que faites-vous, de toute façon ?" ç'avait provoqué le fou rire des Compagnons. "Ne pourrais-tu pas au moins faire semblant de dormir ?" avait demandé Moraelyn plaintivement. "Maintenant je sais pourquoi les elfes noirs ont rarement plus d'un enfant. Ce que je ne comprends pas, c'est comment les humains font pour en avoir autant." Moraelyn et Aliera était revenus s'allonger près de lui, cette nuit, mais après qu'il ait fait semblant de dormir, comme les autres.

Et les bruits étaient trop familiers désormais pour empêcher les images de cette nuit d'aventures de lui venir à l'esprit, aussi nettes que si elles se reproduisaient sous ses yeux. Il pouvait sentir son daedra se nourrir et ne pouvait pas l'en empêcher. Il trouvait que ça n'était pas équitable, mais il commençait à comprendre ce que Moraelyn voulait dire par "nourris ton daedra et marche avec les dieux". Avec Zenithar.

Moraelyn revint, portant Aliera. Il la déposa avec douceur, puis s'assit entre Edward et elle.

"ç'a dû être difficile, étant donné que c'est une femme." Dit-il doucement. "C'était dur, de la regarder. De seulement la regarder."

Edward acquiesça d'un signe de tête.

"Je le lui ai demandé assez souvent," poursuivit Moraelyn. "Elle m'a raconté à quel point c'était dur, mais je n'avais jamais su jusqu'à cette nuit. Je savais qu'elle gagnerait. Zenithar était avec elle, et la seule chose qu'avait le baron, c'était son daedra. Et pourtant c'était très dur à voir. Elle a lancé ce sort à neuf reprises sur dix, et le bouclier avait d'autres enchantements si elle manquait son coup, il serait tombé de fatigue avant de l'avoir entièrement déchargé."

"J'y pense encore également... Et le garde que vous avez.... Il vous avait demandé grâce ?"

"Je sais. Et pourtant, il entendait ça nuit après nuit. Et il restait au service du baron."

"La plupart des hommes ne sont pas aussi forts que vous. Peut-être ne pouvait-il pas agir de lui-même ?" Pourquoi plaidait-il la cause d'un homme déjà mort ? Sa mémoire continuait à rejouer les événements de cette nuit-là comme s'ils pouvaient encore se dérouler autrement, pour le meilleur ou pour le pire.

"Même ne faire qu'assister à un acte aussi maléfique, cela corrompt l'âme. Regarder et ne rien faire. Mats aurait arrêté ma main s'il y avait eu quelque chose qui valait d'être protégé. Et le fait qu'il était jeune rend la situation encore pire ; je suis désolé que tu aies dû vivre une nuit pareille."

"Est-ce que mon âme est corrompue maintenant ?"

"Tu as sentit la morsure de l'acide, comme nous tous, mais tu t'en remettras."

"Pouvez-vous me guérir maintenant ?"

"Oui"' Moraelyn prit le garçon dans ses bras, puis bascula de sorte qu'Edward se retrouve entre ses parents. Aliera passa ses bras autour de lui sans vraiment se réveiller. Sa forte odeur de femme mêlée au musc de Moraelyn à la tombée de la nuit apportait des odeurs d'épices dans les narines d'Edward.

"Elle était tellement en colère." murmura Edward. Il se demandait s'il pourrait vraiment la voir de la même façon qu'avant, et pourtant ses bras étaient aussi réconfortants qu'auparavant. Peut-être Moraelyn avait-il également besoin de ce réconfort et avait-il été assez sage pour le demander.

"C'est une femme. Ce genre de blessures infligées à une autre la touche profondément." dit-il.

A quel point ? Le garçon considéra la question qu'il n'osait pas poser.

"Ton père n'est pas un monstre. Mais elle a été mariée à un homme qui ne lui prêtait aucune attention, et qu'elle ne pouvait pas quitter. C'est assez courant pour ta race, ce qui ne rend pas cela plus facile à supporter, je crois."

"Elle aussi a un daedra, alors ?" demanda tristement Edward.

"C'est avec elle que tu dois en parler."

"Ce n'était pas vraiment un combat à la loyale, elle avait un bouclier et lui non."

"Les combats loyaux, c'est dans l'arène, mon garçon. Combattrais-tu un loup ou un chien de chasse sans armes, ni sorts, ni armure, puisqu'ils n'en ont pas? Moi non."

"Que deviendront Caron et Ora ? Et les autres gens maintenant que le baron est mort ?"

"Ai-je l'air du prophète Marukh ? Comment pourrais-je le savoir ? Nous pouvons nous arrêter ici au printemps et voir ce qui a été planté sur le terrain que nous avons brûlé ce soir. Je n'ai pas l'intention de rester et de cultiver ça. J'ai déjà mes propres terres à cultiver. Ecoute-moi, voilà que je parle comme un fermier Nordique. Mes propres mines à creuser, ça serait plutôt ça." Il bâilla.

"Les autres ne pensaient pas à ce qui arriverait après. Vous, si."

"Je suis un roi ; c'est notre rôle."