Confessions d'un marchand de fourrures khajiit

De La Grande Bibliotheque de Tamriel
Aller à : navigation, rechercher
Média d'origine : TES 5 : Skyrim-Dawnguard

Par Anonyme


Mon exécution est pour demain. Mon geôlier m'a demandé ce que je souhaitais en guise de dernier repas.

Du papier, ai-je répondu. Une plume et une bougie.

Le jarl sera ravi d'avoir mes aveux, et j'aime autant m'occuper l'esprit.

Le jour où le harem de mon père a brûlé, et où notre famille a tout perdu, mon frère et moi sommes devenus mendiants dans les bas-fonds d'Elsweyr. Jamais je n'oublierai la première fois que nous avons dérobé la bourse d'un voyageur, presque par accident. Il a suffi d'un petit coup de griffe pour empocher le pactole. Nous avons festoyé comme des rois ce soir-là, et pour la première fois depuis des mois, nous avons dormi dans un bon lit douillet.

Peu après, mon frère et moi avons choisi la voie des assassins. Le gang qui nous accueillit nous traita comme les orphelins misérables que nous étions. Nous avons volé, escroqué, poignardé et ces années de débauche et de survie nous ont rudement mis à l'épreuve. J'ai notamment perdu la moitié d'une oreille contre un Argonien aveugle qui avait trop bu.

Je voulais raccrocher, mais mon frère avait des rêves de grandeur.

Il envisageait de passer en Cyrodiil pour y devenir marchand. On avait tout prévu. Il ne nous restait plus qu'un coup : détourner une caravane en route vers le nord qu'on disait remplie de joyaux.

Les choses ont mal tourné. Mon frère n'a pas réussi à freiner les chevaux à temps et j'ai vu le chariot plonger dans le vide. Je n'ai rien pu faire. Mais ce que j'ai trouvé dans les décombres m'a amplement consolé : il ne s'agissait pas de joyaux, mais d'un chargement de peaux de loups, de mammouths et de défenses de horqueurs. J'avais largement de quoi payer le passage en Cyrodiil. J'allais marcher dans les pas de bon nombre de Khajiits en devenant un marchand voyageur, profession respectable s'il en est.

J'avais déjà empaqueté toutes les peaux quand j'aperçus le corps brisé de mon frère. Ses oreilles étaient encore tièdes, et je fermai ses yeux sans vie. C'était son rêve, il aurait voulu que je me lance dans cette aventure. De mon côté, je devais partir ; les gardes allaient arriver d'une minute à l'autre. Mais je ne pouvais pas décemment le laisser pourrir sur place.

Je tiens ma première peau de mon frère. Je la gardais en souvenir de lui. Mais dans la cabine obscure du receleur, l'or pesait lourd dans ma main. Elle a jeté un regard à cette peau et elle m'en a offert le triple. Je sentis ma gorge se serrer de honte, mais je me maîtrisai. Je ne pouvais pas me payer le luxe de refuser. Seuls importaient la valeur du produit, la demande, le respect.

Voilà ce que je voulais.

C'est devenu une formalité. Une ruelle sombre, une main qui étouffe et l'autre qui tranche proprement la gorge. Il suffit de tenir le corps pendant que le sang s'échappe. J'ai gagné en vitesse, en précision et en fluidité. J'incise d'un seul geste et la marchandise reste intacte.

Je suis devenu riche, beaucoup plus riche que quiconque dans ma famille. Mais j'ai su rester prudent. Habilement dissimulée, ma forteresse était imprenable. J'ai embauché mes anciens employeurs. Nous empruntions généralement des sentiers peu fréquentés pour chasser. Dans les villes, nous hantions les ruelles dans lesquelles nous dormions à l'époque où c'était notre terrain de chasse. Je suis devenu si riche que je n'avais plus besoin de me salir les mains.

Ce sont les peaux bigarrées qui rapportent le plus chez les Bosmers. Les Argoniens les préfèrent entièrement détachées et déjà tannées. Les Orques apprécient le cuir épais et imperméable des Argoniens et les hommes se contentent généralement des queues et des oreilles. Il m'a fallu embaucher un alchimiste et un maître artisan pour satisfaire quelques clients très particuliers, mais je n'ai pas posé de questions tant que l'or pleuvait.

Et me voilà prisonnier. Serais-je devenu négligent ? J'ai peut-être révélé trop de secrets sur l'oreiller à mes conquêtes. L'assaut de ma forteresse s'est soldé par un véritable massacre. Ils m'ont capturé vivant, quoique salement blessé. C'était une erreur. Ils auraient dû me tuer quand ils en avaient l'occasion.

J'ai un outil de crochetage et le mur nord de la cellule tombe presque en ruines. Ce n'est pas demain que j'irai nourrir les vers.

Je n'ai pas l'intention de mettre la clé sous la porte. Il y aura toujours des acheteurs. Un jour, je vendrai ma propre peau : j'en tirerai une fortune car mon nom sera devenu légendaire, tandis que vos os pourriront dans un caniveau, oubliés de tous.

- Le marchand de fourrures