Menace grandissante, vol. 1

De La Grande Bibliotheque de Tamriel
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Média d'origine : TES 5 : Skyrim

Par Lathenil de Solandie


Ce récit est l'oeuvre de Lathenil de Solandie, un réfugié Altmer qui a quitté l'Archipel de l'Automne pour venir en Cyrodill dans les premières années de l'ère Quatrième. Selon lui, il n'a pas fui la désolation de la crise d'Oblivion mais plutôt "l'ombre grandissante des Thalmor qui s'étendait sur ma terre natale".

Lathenil avait une présence très intense, pour rester poli, et certaines de ces accusations de l'implication des Thalmor sont proches du délire. Ceci explique sans doute pourquoi ses avertissements obstinés et ses critiques publiques des Thalmor ainsi que du Domaine Aldmeri n'ont pas été écoutés ... mais l'histoire, au moins partiellement, lui a donné raison.

Praxix Erratuim, historien impérial


Je n'était guère qu'un enfant quand la Grande frayeur s'abattit sur nous. L'air lui-même se déchira sous nos yeux, laissant apparaître des plaies béantes d'où se déversaient des Daedra échappés des entrailles d'Oblivion. Nous fûmes nombreux à fuir vers les côtes pour nous soustraire des hôtes meurtriers de Dagon ... mais la mer trahit notre peuple et se souleva pour écraser navires et ports, nous livrant à un destin si funeste que la mort eut été un soulagement.

La Tour de cristal tint bon, ultime bastion d'espoir au sens propre comme au figuré.

Les réfugiés emplirent la Tour jusqu'à ce qu'elle ne puissent en contenir un seul de plus. Je pouvais sentir la peur qui rendait l'air si lourd, je sentais le poids de la chape qui nous étouffait. Nous pouvions voir les Daedra traverser les bois au loin, mais ils ne venaient jamais. Les jours passaient, et jamais ils n'approchaient à portée de flèche de nos fortifications. L'espoir commença à renaître. Certains osèrent dire : "Ils ont peur de nous, même un Daedra sait qu'il ne fait pas le poids face à la sagesse et la magie du Cristal-qui-fait-loi !".

Comme si les vils habitants d'Oblivion avaient attendu cet instant précis, alors que nos têtes commençaient à se relever, pour agir.

Pendant la nuit, d'innombrables légions de Daedra s'amassèrent autour de nous ... et ils n'étaient pas seuls : des centaines de prisonniers altmers les accompagnaient. Au lever du jour, nous fûmes réveillés par leurs hurlements alors que les Daedra avaient entrepris de les fouetter et de les écorcher. Nous ne pûmes qu'observer, le coeur retourné d'horreur, alors que nos semblables étaient mis en pièces ... découpés et mangés vivants, empalés sur d’atroces machines de guerre et donnés en pâtures à d'horribles bêtes de cauchemar.

Ce bain de sang n'était qu'un prélude à leur appétit.

Une fois qu'ils en eurent fini avec les nôtres, les Daedra se tournèrent vers la Tour de cristal. Notre grand et noble bastion fut un obstacle éphémère, comme peut l'être le puissant chêne pris dans un glissement de terrain : il tint fermement, en apparence assez robuste pour survivre au déferlement de destruction qui l'entourait, mais ce n'était qu'illusion; il finit par lâcher prise et sombrer.

Nos sorciers exaltés décimaient les assaillants, les faisant rôtir par douzaine. Nos archers trouvaient la plus petite ouverture dans les armures daedra à plus de cent pas, faisant tomber capitaines et commandants. La puissance et la précision de nos héroïques combattants étaient bouleversante à voir, mais cela ne suffisait pas.

Les Daedra gravissaient les montagnes des corps de leurs morts, ils marchaient tête baissée vers la mort et la destruction là où la plus puissante des armées de Tamriel aurait défailli de peur.

Quand ils ouvrèrent une brèche dans les murs, je pris la fuite avec les autres lâches. Je n'en ressens aucune fierté. Cet acte hante mon esprit depuis ce jour et bien que cela me coûte de le confesser, c'est bien ce que j'ai fait. Nous fuîmes dans une panique désordonnée abandonnant à leur sort les vaillants Altmers qui tenaient les rangs pour empêcher le massacre ... pour préserver et défendre notre illustre Tour de cristal.

Nous traversâmes des corridors astucieusement dissimulés et émergeâmes bien loin du chaos qui s'était abattu sur la Tour. C'est à ce moment que cela arriva. Tout commença comme une bourrasque qui soulève les feuilles d'une forêt dense, mais le son ne faiblissait pas. Puis un rugissement s'éleva et la terre commença à trembler sous mes pieds. Je me retournai pour regarder et le monde s'arrêta ...

Je restai figé de stupeur en voyant le coeur de ma terre natale comme arraché à ma poitrine. L’impensable, l'incompréhensible se produisait ... la tour du Cristal-qui-fait-loi s'était effondrée, avec toute la dignité d'un mendiant frappée par une main de fer. Je l'observai pendant une éternité, essayant de réconcilier ce que j'avais vu avec ce que je savais.

Des sanglots soulevèrent ma poitrine et des pleurs se firent entendre autour de moi : le sort se rompit et je sûs à nouveau où je me trouvais. Des dizaines de réfugiés étaient tétanisés par la même horreur qui m'avait ensorcelé. "Fuyez". Ce ne fût qu'un pitoyable coassement alors que le coeur de ma patrie, mon coeur, se brisait en mille morceaux. Personne ne bougea, pas même moi.

Je parvins à rassembler le peu de volonté qui restait en moi et à ravaler la peur, la haine et l'agonie que me causait ce qui venait de se passer, pour transformer ce souffle en cri strident : "FUYEZ !". Je me mis alors à courir, ressentant, plutôt que voyant, que les autres m'avaient suivi.